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La pensée de « Révolution et Contre-Révolution »

Le terme “Révolution”, qui indique originellement le mouvement céleste des astres, reçut une nouvelle signification au XVIIIe siècle, surtout après la Révolution française, dès lors archétype de toutes les révolutions, même de celles qui historiquement la précédèrent. L’étude des révolutions est aujourd’hui l’un des thèmes fondamentaux de la pensée politique. “Révolution - affirme le philosophe Augusto Del Noce - est le mot-clef pour comprendre notre époque” et “l’analyse de l’idée de révolution est le premier problème de la philosophie”. Guerres et révolutions, observe de son côté Hannah Arendt, “ont déterminé la physionomie du vingtième siècle”. Mais tandis que les guerres appartiennent aux phénomènes les plus anciens du passé, “les révolutions, à proprement parler, n’existent pas avant les temps modernes; elles sont, parmi les données politiques majeures, les plus récentes”.

C’est avec l’illuminisme que le terme “révolution” changea de signification et fut compris comme un phénomène de caractère périodique destiné à déterminer profondément le cours de l’histoire. Voltaire parle souvent d’une “révolution des esprits”, une révolution des intelligences dont les philosophes, les illuministes, posaient les germes. “Il s’est fait dans l’esprit humain - écrit-il en 1769 - une étrange révolution depuis quinze ans. (...) Encore quelques années et le grand jour viendra après un si beau matin”. Ce concept d’une vraie régénération ou palingénésie de la société assume sa signification moderne justement à cause de ce qui se déroula en France entre 1789 et 1795.

Pour Plinio Corrêa de Oliveira, la Révolution n’est pas le bouleversement de tout ordre établi, et la Contre-Révolution ne constitue pas non plus une attitude de type réactif face à une réalité à laquelle on s’oppose. Il entend donner à ces vocables le sens précis que leur donnèrent, à partir de la Révolution française, le Magistère pontifical et ce courant fécond de la pensée catholique qui, s’inspirant du même Magistère et quelquefois l’anticipant, fut appelé “contre-révolutionnaire”.

L’auteur le plus connu est le comte Joseph de Maistre, le penseur savoyard auquel on doit l’une des premières réflexions sur la Révolution de 1789. Mais cette école de pensée eut une étendue bien plus grande que celle des noms auxquels on la rattache d’ordinaire. Avant même Joseph de Maistre, le jésuite Pierre de Clorivière eut l’intuition de la profondeur de la Révolution française dont il traça un tableau surprenant: “La Révolution que nous avons vu se déchaîner - écrit-il en 1794 - présente, indiquée d’avance par les Saints Livres, trois principaux caractères: elle a été subite, elle est grande, elle sera générale”. Dans ce sillage, on rencontre au XIXe siècle des noms comme Louis de Bonald, Juan Donoso Cortés, Karl Ludwig von Haller, le cardinal Edouard Pie, monseigneur Charles Freppel et, au début de notre siècle, monseigneur Henri Delassus, valeureux apologiste que Plinio Corrêa de Oliveira tenait en particulière considération. Il ne faut pas oublier, à côté de ces auteurs, l’enseignement des papes, surtout celui du vénérable Pie IX et de saint Pie X dont la lettre Notre Charge Apostolique de 1910, qui contient toute sa pensée, peut être définie, selon dom Besse, comme “la Contre-Révolution en acte”.

La pensée des contre-révolutionnaires est en ce sens apparentée, bien que distincte, à celle des conservateurs qui ont en Edmund Burke leur précurseur, et se confond avec celle des”ultramontains”, adversaires du catholicisme libéral et défenseurs intransigeants de la Primauté pontificale au XIXe, parmi lesquels se distinguent Louis Veuillot en France, saint Antoine Marie Claret en Espagne, et les grands convertis en Angleterre tels le cardinal Henry Edward Manning et le Père Frederick William Faber.

A ces noms d’intellectuels, il convient de joindre au moins celui d’un homme d’Etat qui symbolise la Contre-Révolution du XIXe siècle: le président de l’Equateur Gabriel García Moreno, dont la figure est riche d’analogies avec celle de Plinio Corrêa de Oliveira.

Révolution et Contre-Révolution s’inscrit donc dans un courant catholique qui a une physionomie précise au sein de l’histoire moderne. Cette ligne de pensée est caractérisée par une adhésion intégrale au Magistère pontifical dans toutes ses expressions et par une méditation approfondie sur le processus historique commencé avec la Révolution française. L’oeuvre de Plinio Corrêa de Oliveira n’est point cependant une répétition de la pensée contre-révolutionnaire précédente, mais une nouvelle élaboration géniale et un développement de cette pensée qui fait de l’auteur un authentique “docteur” de cette école au XXe siècle. En effet, d’un côté il élabora à nouveau et systématisa, avec une extrême capacité de synthèse, la pensée précédente; de l’autre, il l’enrichit de dimensions nouvelles et jusqu’alors inexplorées.

2. La Chrétienté dans le Magistère Pontifical.

Révolution et Contre-Révolution se fonde sur un présupposé historique et philosophique en pleine harmonie avec le Magistère de l’Eglise: la nécessité de conformer à la loi du Christ non seulement les individus singuliers, mais aussi les sociétés et les Etats, sur lesquels s’exerce la souveraineté exclusive du Rédempteur. La Civilisation catholique est le fruit de cette oeuvre de christianisation de la vie sociale. La civilisation catholique - affirme-t-il - est à l’Eglise ce que l’eau est pour sa source, ou la lumière pour le foyer qui la projette. Pour le penseur brésilien, les peuples chrétiens forment une authentique famille dans le sens le plus vrai du terme. Comme la famille, la Chrétienté est unie par une communauté de vie: la vie surnaturelle qui fait de tout fidèle un fils adoptif de Dieu en Jésus-Christ. Le concept de chrétienté est une projection dans le domaine naturel de la grande réalité surnaturelle représentée par le Corps mystique de Notre Seigneur Jésus Christ.

Saint Pie X, dans l’encyclique Il fermo proposito du 11 juin 1905, avait rappelé que “ la civilisation du monde est une Civilisation chrétienne; elle est d’autant plus vraie, plus durable, plus féconde en fruits précieux, qu’elle est plus nettement chrétienne”, et il réaffirmait dans la Lettre Notre charge apostolique du 25 août:

La civilisation n’est plus à inventer ni la cité nouvelle à bâtir dans les nuées. Elle a été, elle est; c’est la civilisation chrétienne, c’est la cité catholique. Il ne s’agit que de l’instaurer et la restaurer sans cesse sur ses fondements naturels et divins contre les attaques toujours renaissantes de l’utopie malsaine, de la révolte et de l’impiété: omnia instaurare in Christo”.

La Civilisation chrétienne, enseigne Léon XIII, eut sa concrète expression historique en la chrétienté médiévale.

Il fut un temps où la philosophie de l’Evangile gouvernait les Etats. A cette époque, l’influence de la sagesse chrétienne et sa divine vertu pénétraient les lois, les institutions, les moeurs des peuples, tous les rangs et tous les rapports de la socitété civile. Alors la religion instituée par Jésus-Christ, solidement établie dans le degré de dignité qui lui est dû, était partout florissante, grace à la faveur des princes et la protection légitime des magistrats. Alors le sacerdoce et l’empire étaient liés entre eux par une heureuse concorde et l’amical échange de bons offices. Organisée de la sorte, la société civile donna des fruits supérieurs à toute attente, dont la mémoire subsiste et subsistera consignée qu’elle est dans d’innombrables documents que nul artifice des adversaires ne pourra corrompre ou obscurcir”.
Cette réalité lumineuse - commente Plinio Corrêa de Oliveira - fruit d’un ordre et d’une divine perfection, plus surnaturels et célestes que naturels et terrestres, s’appela la Civilisation chrétienne, produit de la culture chrétienne, qui à son tour est fille de l’Eglise catholique. La Chrétienté médiévale fut donc la société humaine qui, dans l’histoire, réalisa l’idéal catholique avec la majeure perfection. Si Maritain a écrit: “il n’y a qu’une Eglise catholique; il peut y avoir des civilisations chrétiennes, des chrétientés diverses”, le penseur brésilien affirmait au contraire avec vigueur que la chrétienté ne fut pas un ordre quelconque, possible comme le seraient beaucoup d’autres. Ce fut la réalisation, en des circonstances inhérentes aux temps et aux lieux, du seul ordre véritable entre les hommes, à savoir la civilisation chrétienne.


L’origine du terme et du concept de Moyen Age est liée à une vision de l’histoire qui entendait caractériser un millénaire de l’histoire occidentale comme une longue “nuit”, une parenthèse ténébreuse entre la “lumière” du monde païen et la “renaissance” de l’âge moderne; à une telle conception, déjà présente chez Pétrarque et dans l’humanisme italien, reviendront les illuministes du XVIIIe siècle. De cette manière, observe Eugenio Garin, “le contraste entre l’âge sombre et la renaissance lumineuse alimentera une polémique de près de quatre siècles, du XIVe au XVIIIe, liant de façon idéale l’Humanisme et l’Illuminisme”.

La “légende noire” sur le Moyen Age, relancée par l’historiographie marxiste, est définitivement tombée. Aucun historien sérieux n’accepterait aujourd’hui de considérer le Moyen Age comme une parenthèse d’obscure barbarie. Le terme Moyen Age a perdu tout caractère sémantique de sens négatif, pour ne plus indiquer que cette époque historique durant laquelle toute la société, dans ses institutions, ses lois, ses moeurs, se laissa modeler par l’Eglise catholique. C’est pourquoi Benoît XV définit l’Europe médiévale comme une civilisation homogène dirigée par l’Eglise et Pie XII affirme qu’ “il est juste de reconnaître au Moyen Age et à sa mentalité une note d’authentique catholicité: la certitude indiscutable que la religion et la vie forment, dans l’unité, un tout indissoluble”.

Toute la société médiévale se conformait harmonieusement à l’ordre naturel disposé par Dieu Lui-même dans la création de l’univers, et à l’ordre surnaturel inauguré avec la Rédemption et inspiré par l’Eglise. Cette société fut la grande civilisation qui émergea avec lenteur mais vigoureusement du chaos de l’âge barbare sous l’influence des énergies naturelles et surnaturelles des peuples baptisés et ordonnés au Christ.

La conversion des peuples d’Occident - écrit Plinio Corrêa de Oliveira - n’est pas un phénomène de surface. Le germe de vie surnaturelle a pénétré au plus profond de leur âme et graduellement a rendu l’esprit rude, lascif et supersticieux des tribus barbares de jadis semblable à celui de Notre Seigneur Jésus Christ. La société surnaturelle - l’Eglise - a ainsi étendu sur toute l’Europe son organisation hiérarchique: depuis les brumes d’Ecosse jusqu’aux côtes du Vésuve, diocèses, monastères, paroisses, cathédrales et abbatiales fleurissaient - et autour, paissait le troupeau du Christ. (...) Des royaumes et de nobles souches naquirent de ces énergies vivifiées par la Grâce, ainsi que les coutumes courtoises et les lois justes, les corporations et la chevalerie, la philosophie scolastique et les universités, le style gothique et le chant des ménestrels.

Quelles furent les causes de la décadence de la Civilisation médiévale? Léon XIII écrit dans l’encyclique Immortale Dei que “ce pernicieux et déplorable goût de nouveautés qui vit naître le XVIe siècle, après avoir d’abord bouleversé la religion chrétienne, bientôt par une pente naturelle passa à la philosophie, et de la philosophie à tous les degrés de la société civile”. Les domaines religieux, intellectuel et politico-social, sont les trois champs investis par le processus de dissolution que le Pape appelle le “droit nouveau”. Il s’agit d’un “ennemi” déclaré de l’Eglise et de la Chrétienté que Pie XII décrivit à son tour en ces termes :

Il se trouve partout et au milieu de tous: il sait être violent et rusé. Ces derniers siècles, il a tenté de réaliser la désagrégation intellectuelle, morale, sociale de l’unité dans l’organisme mystérieux du Christ. Il a voulu la nature sans la grâce; la raison sans la foi; la liberté sans l’autorité; parfois l’autorité sans la liberté. C’est un ‘ennemi’ devenu de plus en plus concret, avec une absence de scrupules qui surprend encore: le Christ oui, l’Eglise non! Puis: Dieu oui, le Christ non! Finalement le cri impie: Dieu est mort; et même: Dieu n’a jamais existé. Et voici, maintenant, la tentative d’édifier la structure du monde sur des bases que Nous n’hésitons pas à indiquer comme principales responsables de la menace qui pèse sur l’humanité: une économie sans Dieu, un droit sans Dieu, une politique sans Dieu”.

Cet ennemi constituera l’objet spécifique de l’étude de Plinio Corrêa de Oliveira qui, après avoir mis en lumière la nature et le mode d’action de l’adversaire, proposera les lignes d’une réaction efficace pour l’anéantir et pour restaurer la Civilisation chrétienne.

Synthétisant la nature de l’antagonisme irréductible entre l’Eglise et son ennemi mortel, il écrit:

Cet ennemi terrible a un nom: il se nomme Révolution. Sa cause profonde est une explosion d’orgueil et de sensualité qui inspira, nous ne dirions pas un système, mais toute une chaîne de systèmes idéologiques. Du large accueil qui leur fut fait dans le monde entier, découlèrent les trois grandes révolutions de l’histoire de l’Occident: la pseudo-Réforme, la Révolution française et le Communisme.

3. La grande crise de l’Occident chrétien.

Les nombreuses crises qui secouent le monde d’aujourd’hui - crise de l’Etat, de la famille, de l’économie, de la culture, etc. - ne constituent que les multiples aspects d’une seule crise fondamentale, dont l’homme est le propre champ d’action. En d’autres termes, ces crises ont leur racine dans les régions les plus profondes de l’âme et de là s’étendent à tous les aspects de la personnalité de l’homme contemporain et à toutes ses activités.

Au centre de l’oeuvre du Pr. Corrêa de Oliveira il y a donc l’homme, créature rationnelle composée d’âme et de corps aujourd’hui la proie d’une crise profonde.

Pour nombreux que soient les facteurs de cette crise, cependant elle conserve toujours cinq caractères essentiels:

  1. Elle est universelle: il n’y a pas de peuple qui n’en soit touché, d’une manière plus ou moins profonde.
  2. Elle est une, au sens qu’il n’existe pas une pluralité de crises autonomes et dénuées de lien entre elles, mais une même crise qui investit aujourd’hui l’ensemble de ce qui fut un jour la Chrétienté.
  3. Elle est totale, parce que se déroulant sur une si vaste étendue de problèmes, elle s’étend à toutes les puissances de l’âme et à tous les champs d’action de l’homme.
  4. Elle est dominatrice, car elle est comme une reine qui dirige les forces et les événements apparemment chaotiques.
  5. Elle est un processus, c’est-à-dire qu’elle consiste en un long système de causes et d’effets, nés dans les zones les plus profondes de l’âme et de la culture occidentale, qui produisent, depuis le XVe siècle jusqu’à nos jours, des convulsions successives.

4. Les étapes historiques de la Révolution.

Les étapes historiques de ce processus de plusieurs siècles sont les trois grandes révolutions de l’histoire de l’Occident: le protestantisme, la Révolution française et le communisme. Plinio Corrêa de Oliveira résume ainsi ce processus:

  1. La Pseudo-Réforme fut une première révolution. Elle implanta l’esprit de doute, le libéralisme religieux et l’égalitarisme ecclésiastique, à des degrès d’ailleurs variés dans les diverses sectes auxquelles elle donna naissance.
  2. Elle fut suivie par la Révolution française qui fut le triomphe de l’égalitarisme en deux domaines. En premier lieu dans le domaine religieux sous la forme de l’athéisme, spécieusement désigné sous le nom de laïcisme. Et aussi dans la sphère politique avec la fausse maxime selon laquelle toute inégalité est une injustice, toute autorité un danger et la liberté le bien suprême.
  3. Le communisme est la transposition de ces maximes dans le domaine social et économique.

?Pour Plinio Corrêa de Oliveira, les origines de ce processus remontent au XIVe siècle quand, dans l’Europe chrétienne, commença une transformation des mentalités qui devint de plus en plus manifeste au cours du XVe siècle.

L’appétit des plaisirs terrestres se transforme graduellement en convoitise. Les divertissements se font de plus en plus fréquents et somptueux. Les hommes les recherchent toujours davantage. Dans les vêtements, dans les manières, dans le langage, dans la littérature et dans l’art, l’avidité croissante pour une vie pleine des délices de l’imagination et des sens produit des manifestations toujours plus nombreuses de sensualité et de mollesse. On observe un dépérissement progressif du sérieux et de l’austérité des temps anciens. Tout est orienté vers l’agrément, l’enjouement, la frivolité. Les coeurs se détachent de plus en plus de l’amour du sacrifice, de la véritable dévotion à la Croix, et des aspirations à la sainteté et à la vie éternelle. La Chevalerie, qui avait été autrefois l’une des plus hautes expressions de l’austérité chrétienne, devient amoureuse et sentimentale, la littérature d’amour pénètre dans tous les pays, les excès du luxe et la cupidité pour les richesses qui en est la conséquence s’étendent à toutes les classes sociales.

Ce climat moral contenait l’aspiration à un ordre des choses fondamentalement différent de l’ordre médiéval. C’est dans cet état d’âme, dans ces “tendances”, que s’enracinèrent les grandes erreurs doctrinales et les bouleversements historiques des siècles successifs.

5. Les profondeurs de la Révolution.

Le penseur brésilien distingue dans la Révolution trois profondeurs qui, chronologiquement, s’interpénètrent jusqu’à un certain point.

La dimension la plus profonde est celle des “tendances”. Quand les tendances désordonnées de l’homme refusent de se conformer à un ordre des choses qui devrait les guider et les corriger, elles commencent alors à modifier les mentalités, les façons d’être, les moeurs et les expressions artistiques.

De ces strates profondes, la crise passe au terrain idéologique. C’est la révolution dans les idées. Le Pr. Corrêa de Oliveira rappelle la phrase de Paul Bourget dans son oeuvre célèbre Le démon du midi: “Il faut vivre comme on pense, sinon, tôt ou tard, on finit par penser comme on a vécu”. Inspirées par le déréglement des tendances rebelles, pointent les doctrines nouvelles. Au début, elles cherchent parfois un modus vivendi avec les anciennes doctrines, et alors elles s’expriment de manière à maintenir avec elles une apparence d’harmonie qui cependant, normalement, ne tardera pas à déboucher sur une lutte déclarée.

La révolution dans les faits suit la révolution dans les idées lorsqu’elle passe à l’action, avec des moyens sanglants ou non, par la transformation des institutions, des lois et des moeurs, tant dans la sphère religieuse que dans la sphère temporelle.

6. Le rôle des passions dans le processus révolutionnaire.

Le penseur brésilien comprend le processus révolutionnaire, considéré dans son ensemble, et aussi dans ses principaux épisodes, comme le développement, par étapes, et à travers de continuelles métamorphoses, de certaines tendances déréglées de l’homme occidental et chrétien, ainsi que d’erreurs et de mouvements fomentés par ces tendances.

La cause la plus profonde de ce processus consiste, pour Plinio Corrêa de Oliveira, en une explosion d’orgueil et de sensualité qui a inspiré toute une chaîne de systèmes idéologiques et toute une série d’actions conséquentes.

L’orgueil mène à la haine de toute supériorité et, par suite, à l’affirmation que l’inégalité en tant que telle est un mal, sur tous les plans, et principalement sur les plans métaphysique et religieux. C’est l’aspect égalitaire de la Révolution.
La sensualité, en tant que telle, tend à renverser toutes les barrières. Elle ne tolère pas de frein et conduit à la révolte contre toute autorité et toute loi, qu’elle soit divine ou humaine, ecclésiastique ou civile. C’est l’aspect libéral de la Révolution.
Ces deux aspects, qui possèdent au fond un caractère métaphysique, paraissent contradictoires en de nombreuses occasions, mais ils se concilient dans l’utopie marxiste d’un paradis anarchique dans lequel une humanité hautement évoluée, ‘émancipée’ de toute religion, vivrait dans un ordre profond sans autorité politique et dans une liberté totale dont ne découlerait aucune inégalité.

Les auteurs contre-révolutionnaires du XIXe siècle, comme Maistre, Bonald et Donoso Cortés, ont bien décrit la Révolution dans son déroulement d’erreurs doctrinales. Mais ce qui caractérise l’oeuvre de Plinio Corrêa de Oliveira c’est l’attention portée aux facteurs “passionnels” et à leur influence sur les aspects strictement idéologiques du processus révolutionnaire.

Lorsqu’il parle de “passions” comme soutiens de la Révolution, l’auteur se réfère, selon l’usage de divers auteurs spirituels, aux passions désordonnées de l’âme humaine. En accord avec le langage courant, il inclut dans le domaine des passions désordonnées tous les instincts du péché existant dans l’homme à la suite du péché originel et de la triple concupiscence dénoncée par l’Evangile: la concupiscence de la chair, celle des yeux et l’orgueil de la vie.

La Révolution a donc sa première origine et sa plus intime force de propulsion dans les passions désordonnées. Tels les typhons et les cataclysmes, elles ont une force immense, mais vouée à la destruction.

 7. Les vitesses de la Révolution.

Le processus révolutionnaire se manifeste par deux vitesses diverses. La première, rapide, est destinée à un apparent échec, au moins dans l’immédiat. La seconde, beaucoup plus lente, est généralement couronnée de succès.

On peut rattacher à la première vitesse les mouvements révolutionnaires les plus extrêmes, comme ceux des Anabaptistes du XVIe siècle et les courants jacobins et anarchiques des XIXe et XXe siècles. A la seconde, on peut rattacher les courants modérés du protestantisme et du libéralisme qui, avançant par étapes successives tantôt dynamiques tantôt inertes, favorisèrent le glissement vers le même point d’arrivée.

L’échec des extrémistes n’est qu’apparent: ils créent un point d’attraction fixe, qui fascine les modérés par son radicalisme. La société finit par cheminer lentement le long de la voie sur laquelle les radicaux entendaient la porter.

 8. Les agents de la Révolution: la Franc-Maçonnerie et les sectes.

Le simple dynamisme des passions et des erreurs humaines, affirme Plinio Corrêa de Oliveira, n’est pas suffisant à expliquer la marche victorieuse de la Révolution. Ce succès demande l’impulsion et la direction d’agents astucieux et conscients qui puissent orienter un processus révolutionnaire en soi chaotique: c’est surtout le rôle des sectes antichrétiennes, de quelque nature qu’elles soient.

Toutes les sectes et forces secrètes qui se proposent comme fin la destruction de l’Eglise et de la Civilisation chrétienne peuvent en effet être considérées comme des agents de la Révolution. La secte mère, autour de laquelle s’articulent les autres, est la Franc-Maçonnerie. Ainsi qu’on le remarque clairement à la lecture des documents pontificaux, et spécialement à la lecture de l’encyclique Humanum genus de Léon XIII, la Maçonnerie a comme “la dernière et la principale de ses intentions, celle de détruire dans ses fondements tout l’ordre religieux et social né des institutions chrétiennes et de créer un nouvel ordre selon ses désirs qui tire ses fondements et ses normes du naturalisme”.

Dès 1931, Plinio Corrêa de Oliveira commença à traiter du problème de l’action occulte de la Maçonnerie et des forces secrètes. Le penseur brésilien fit souvent référence aux “forces secrètes” qui agissent dans l’histoire, mais justement à cause de l’importance qu’il attribuait au problème, il ne voulut pas appartenir à la troupe des rechercheurs fantaisistes, si nombreux sur ce délicat terrain de recherche. Il affronta toujours ce thème avec sérieux et équilibre, en suivant une école qui compte de grands auteurs tels le Père Augustin Barruel, l’historien Jacques Crétinau-Joly, le Père Nicolas Deschamps et, dans notre siècle, après Mgr Delassus, Mgr Jouin et le comte Léon de Poncins. Ces auteurs, et d’autres, ont documenté d’une manière incontestable l’existence d’une insidieuse conspiration antichrétienne dans l’histoire.

Produire un processus aussi cohérent, aussi continu que celui de la Révolution, à travers les mille vicissitudes de longs siècles remplis d’imprévus de tout ordre, nous paraît impossible sans l’action de générations successives de conspirateurs d’une intelligence et d’un pouvoir extraordinaires. Penser que, sans cela, la Révolution serait arrivée à l’état dans lequel elle se trouve, équivaudrait à admettre que des centaines de lettres jetées par une fenêtre pourraient, spontanément, se ranger sur le sol de manière à former une oeuvre quelconque, par exemple, l’Ode à Satan de Carducci.

En réalité, pour Plinio Corrêa de Oliveira, le vrai problème n’est pas tant celui de dévoiler l’identité des conspirateurs mais celui, d’une tout autre importance, de montrer la nature profonde de la Révolution et les mécanismes grâce auxquels elle avance: en effet les agents peuvent varier, mais le processus révolutionnaire, ses mécanismes et son but antichrétien eux ne changent pas.

Si la classique dénonciation des forces secrètes s’est concentrée sur leurs canaux d’infiltration et de contrôle du corps social, surtout en ce qui concerne les centres politiques et financiers des Etats modernes, l’oeuvre de Plinio Corrêa de Oliveira, comme l’a bien observé Fernando Gonzalo Elizondo, introduit un cadre nouveau:

celui de l’étude et de la dénonciation des techniques maçonniques de gouvernement des âmes; l’explication profonde de la connaissance et de la manipulation des tendances désordonnées, de la création de milieux particuliers, de la diffusion - par les grands moyens de communication ou par d’autres méthodes - d’une mentalité qui, en se propageant, assure le progrès des idées et des faits révolutionnaires”.

9. Le but anarchique de la Révolution.

L’effervescence des passions déréglées, d’un côté éveille la haine de tout frein et de toute loi, de l’autre fait germer la haine de toute inégalité. Une telle effervescence conduit ainsi à la conception utopique de l’anarchisme marxiste, selon laquelle une humanité évoluée, vivant dans une société sans classes ni gouvernement, pourrait jouir de l’ordre véritable et de la plus complète liberté sans que de celle-ci naisse une inégalité quelconque. Comme l’on voit, c’est l’idéal simultanément le plus libéral et le plus égalitaire que l’on puisse imaginer.

L’utopie anarchique du marxisme consiste en un état de choses dans lequel la personnalité humaine rejoindrait un tel degré du progrès qu’il lui serait possible de s’épanouir librement dans une société sans Etat ni gouvernement.

La Révolution est en train de détruire en l’homme contemporain la notion du péché, la distinction même entre le bien et le mal et, ipso facto, elle nie la Rédemption opérée par Notre Seigneur Jésus-Christ qui, sans le péché, devient incompréhensible et perd toute relation logique avec l’histoire et avec la vie.

En plaçant toute sa confiance en l’individu, comme il advient avec le libéralisme, ou dans la collectivité, comme il advient dans sa phase socialiste, la Révolution idolâtre l’homme se fiant en la possibilité d’une “auto-rédemption” par le truchement d’une radicale transformation sociale.

Le but anarchique de la Révolution se confond alors avec l’utopie d’une République universelle dans laquelle toutes les différences légitimes entre les peuples, les familles, les classes sociales, seraient dissoutes en un amalgame confus et désordonné:

Un monde au sein duquel les nations fondues en une seule République Universelle ne sont que des termes géographiques, un monde sans inégalités sociales ou économiques, dirigé par la science et la technique, par la propagande et par la psychologie pour réaliser sans le surnaturel, la félicité définitive de l’homme: voilà l’utopie vers laquelle la Révolution est en train de nous acheminer.

 10. Les valeurs métaphysiques de la Révolution.

Deux notions, conçues comme valeurs métaphysiques, expriment l’esprit de la Révolution: l’égalité absolue et la liberté complète. Elles sont servies par deux passions, l’orgueil et la sensualité. C’est dans ces tristes profondeurs que se trouve la jonction entre ces deux principes métaphysiques de la Révolution, qui sont l’égalité et la liberté, contradictoires à tant d’autres points de vue.

La prétention de penser, sentir et faire tout ce que les passions déréglées exigent, est l’essence même du libéralisme. En réalité, l’unique liberté qu’il protège est celle du mal, s’opposant en cela à la Civilisation catholique qui, au contraire, donne au bien tout l’appui et toute la liberté, mais limite, autant que possible, l’action du mal.

Plinio Corrêa de Oliveira s’arrête donc sur cet égalitarisme radical dont il montre les conséquences dans le domaine religieux, politique et social. La négation de toute inégalité conduit, sur le plan métaphysique, au refus du principe d’identité et de non-contradiction. Il a pour conséquence le panthéisme “égalitaire”, car si le réel est privé d’inégalités et identités spécifiques, tombe aussi la différence entre les hommes et Dieu et tout est alors confusément divinisé. En ce panthéisme réside l’aspect gnostique de la Révolution. L’amour du concret, de l’individuel, du distinct, fut au contraire un trait dominant de la pensée de Plinio Corrêa de Oliveira. Il fit sien le principe fondamental du thomisme selon lequel l’objet propre de l’intelligence humaine n’est point l’être indéfini, mais la “quidditas rei sensibilis”, les essences spécifiques du réel. C’est à travers l’expérience directe des essences spécifiques que l’homme peut s’élever à la connaissance de l’universel et à la formulation même des premiers principes.

L’essence, explique saint Thomas dans le De ente et essentia, est l’objet de la définition de la chose, ce que cette chose est proprement. Tout ce qui existe a une essence propre parce que distingué de la réalité qui l’entoure et ne se confondant pas avec elle. L’essence de l’être est donc sa spécifique unité qui le distingue de la multiplicité du réel.

La première propriété de la réalité que nous connaissons ce sont les essences et, avec elles, non l’unité mais l’inégalité du réel. Ou, plus précisément, nous connaissons l’un à travers le multiple.

Saint Thomas - affirme Plinio Corrêa de Oliveira - enseigne que la diversité des créatures et leur échelonnement hiérarchique sont un bien en soi, car ainsi les perfections du Créateur resplendissent mieux dans la création. Et il ajoute que, parmi les anges comme entre les hommes, dans le Paradis Terrestre comme sur cette terre d’exil, la Providence a établi l’inégalité. C’est pourquoi un univers de créatures égales serait un monde où la ressemblance entre le Créateur et les créatures aurait été éliminée dans toute la mesure du possible. Haïr, en principe, toute espèce d’inégalité, équivaut à se placer métaphysiquement contre les meilleurs éléments de ressemblance entre le Créateur et les créatures: c’est haïr Dieu.

11. La “philosophia perennis” de Plinio Corrêa de Oliveira.

Plinio Corrêa de Oliveira se définit, sans hésitations, comme un thomiste convaincu, se conformant en cela au Magistère de l’Eglise qui au cours du dernier siècle, de Léon XIII à Jean-Paul II, n’a pas cesser de montrer dans le Doctor communis Ecclesiae le point de référence des études philosophiques pour les catholiques. A la différence de nombre de néo-thomistes du XXe siècle, préoccupés à jeter un pont entre la philosophia perennis et la pensée moderne, le penseur brésilien souligna toujours l’inconciliabilité de la philosophie de l’être avec l’orientation de la philosophie “moderne”, de Descartes à Kant, de l’existentialisme au nihilisme contemporain, voyant en la philosophie moderne l’itinéraire progressif de l’intelligence humaine vers le suicide métaphysique.

La Somme de Théologie qui, selon Pie XII, résume “l’univers spirituel du plus grand génie du Moyen Age”, est pour Pie XI “le ciel vu de la terre”. A côté de saint Thomas, dont il connut et commenta amplement la Somme, Plinio Corrêa de Oliveira plaça saint Bonaventure dont la philosophie a été bien définie comme la “plus médiévale des philosophies du Moyen Age”. Le penseur brésilien se proposa de recomposer la voûte de cet arc de la pensée dont les piliers furent les deux grands docteurs de l’Eglise, placés par Sixte-Quint sur le même degré de sainteté de la doctrine et d’autorité magistrale: “Hi enim sunt duae olivae et duo candelabra” (Apoc. 11, 1).

La vision intellectuelle harmonieuse de Plinio Corrêa de Oliveira se rattache aux profondes et lapidaires sentences sur la “Sagesse” de saint Thomas et de saint Bonaventure. Si le Docteur Angélique affirme: “Sapientia est ordinare et iudicare”, le Docteur Séraphique lui fait écho en écrivant : “Sapientia diffusa est in omni re”.

Omnia in mensura et numero et pondere disposuisti” récite la Sainte Ecriture. Le philosophe belge De Bruyne souligne l’exceptionnelle importance de ce verset sur lequel se fonde ce qu’il définit comme l’harmonieuse esthétique du Moyen Age. “Plinio Corrêa de Oliveira - rappelle l’un de ses disciples - vécut, dès l’aurore de sa ‘vision primordiale’, cette esthétique savante. Petit à petit il l’a explicitée jusqu’à la rendre un des fondements de la doctrine contre-révolutionnaire, de ce qu’il appelle souvent ‘l’image totale de la Contre-Révolution’”.

Le Pr. Corrêa de Oliveira invita ses disciples à approfondir la notion de “analogia entis” et la théorie de la participation, tout comme la valeur gnoséologique et métaphysique du symbole. La vision de l’univers de Plinio Corrêa de Oliveira, à l’instar de la vision médiévale, “se déploie comme un vaste ensemble de symboles, se dresse comme une cathédrale d’idées. C’est la conception du monde la plus richement rythmique, c’est l’expression polyphone de l’harmonie éternelle”. Pour l’homme médiéval, il n’existe rien qui soit sans signification: “nihil vacuum neque sine signo apud Deum”, et tout ce qui existe est fait de manière à réveiller dans l’âme la pensée et le souvenir de Dieu. “Dans toute créature, il y a la splendeur de l’exemplaire divin (...). Ainsi, tout être est-il une voie qui conduit à l’exemplaire, un vestige de la sagesse de Dieu”.

Saint Bonaventure nous propose un itinéraire de l’âme à Dieu “à travers les signes” du monde sensible qui nous adressent, sous des caractères toujours différents et inégaux, un unique appel divin. La vérité des choses consiste à représenter la vérité suprême, la cause exemplaire. C’est cette ressemblance entre la créature et le Créateur qui nous permet de nous élever des choses jusqu’à Dieu. “L’intellect humain a été créé pour monter graduellement - comme sur les marches d’un escalier - jusqu’au souverain Principe qui est Dieu”.

Parmi les “preuves” classiques de l’existence de Dieu, Plinio Corrêa de Oliveira apprécia surtout la “quatrième voie”, la percevant cependant plus comme une méthode de formation et un processus psychologique qui modèle l’âme humaine que comme un abstrait syllogisme philosophique.

La “quatrième voie” qui conduit à Dieu, Etre très parfait, à travers les perfections dont participe, dans une mesure et à un degré divers, tout le créé, est la plus platonicienne des cinq preuves. Elle montre Dieu non seulement en tant que cause efficiente et cause finale, mais aussi en tant que cause exemplaire de la création, et elle contemple l’ordre du créé comme un univers d’harmonie et de beauté, reflet de la Beauté divine incréée.

La beauté divine se reflète sur l’ensemble hiérarchique et harmonique de tous les êtres créés. D’une certaine façon, il n’y a pas de meilleure manière, pour connaître la beauté infinie et incréée de Dieu, que d’analyser la beauté finie et créée de cet ensemble, plus encore que de chaque être de l’univers. Outre le cosmos, Dieu se reflète sur un chef d’oeuvre plus élevé et plus parfait encore: le Corps Mystique du Christ, société surnaturelle que nous vénérons sous le nom de Sainte Eglise catholique, apostolique et romaine. Elle constitue aussi un univers d’aspects harmonieux et variés qui chantent et reflètent, chacun à sa façon, la magnificence sainte et ineffable de Dieu et du Verbe Incarné. La contemplation, de l’univers créé d’un côté, et de la Sainte Eglise catholique de l’autre, peut nous élever jusqu’à la considération de la beauté sainte, infinie et incréée de Dieu.

A partir de Kant, la philosophie moderne a réduit la beauté à la condition d’élément purement subjectif. Mais le beau, selon la philosophia perennis, est une propriété transcendantale de l’être, c’est-à-dire une perfection qui convient à toute chose en tant qu’elle est, sans exceptions. En tant que propriété de l’être, le pulchrum se rattache aux attributs transcendantaux du vrai - parce que plaît ce qui est connu de l’intellect, et du bien - parce que l’objet du beau satisfait l’appétit sensible. Le beau est la splendeur du vrai et du bien, il est plutôt une synthèse du vrai et du bien. “Le beau est comme une synthèse des transcendantaux. Il est proprement l’excellence d’intelligibilité d’un objet dont les parties lumineusement harmonisées (unité) fascinent l’intelligence (vérité) et captivent la volonté (bonté)”. Le beau, comme l’affirme saint Bonaventure, embrasse toutes les causes et est commun à chacune d’elles. La gloire de Dieu, fin ultime de l’homme et de l’histoire, est la contemplation de sa Beauté et ce qui constitue la félicité de l’homme. Si de fait l’âme, en connaissant le vrai, se meut vers la fin qui est le Bien divin, elle le fait d’un élan encore plus grand lorsqu’elle aperçoit Dieu à travers la beauté des choses créées. Plinio Corrêa de Oliveira fut un ardent défenseur du “beau” comme arme de la Contre-Révolution au XXe siècle.

S’il est vrai que le pulchrum est un autre nom du verum et du bonum , sa substitution par l’horridum n’est qu’un aspect, plus insidieux parce que moins ressenti, de ce processus de destruction de toute qualité de l’Etre qui caractérise la Révolution. Dans cet amour pervers pour la laideur se manifeste la haine des forces révolutionnaires pour la beauté humaine, image de la Beauté divine. La Révolution veut détruire toute forme de pulchrum dans la vie de l’homme afin de rendre plus difficile, sinon impossible, le cheminement vers Dieu à travers les créatures.

12. Ambiances, coutumes, civilisation.

Plinio Corrêa de Oliveira écrit dans Révolution et Contre-Révolution que Dieu a établi de mystérieuses et admirables relations entre certaines formes, couleurs, sons, parfums, saveurs et certains états d’âme; il est clair que par ces moyens l’on peut influer profondément sur les mentalités et conduire les personnes, les familles et les peuples à se former un état d’esprit profondément révolutionnaire.

Ce passage est fondamental pour comprendre la singulière contribution de Plinio Corrêa de Oliveira à la revue “Catolicismo” dans la rubrique Ambiances, coutumes, civilisation, dont beaucoup n’ont pas saisi l’extraordinaire portée.

L’ambiance est l’harmonie qui résulte des êtres divers réunis en un même lieu et qui exerce une profonde influence sur les hommes. Les hommes se forment des milieux à leur image où les moeurs et les civilisations se développent. Mais l’inverse, en général, est aussi vrai: les milieux forment à leur image les hommes, les moeurs, les civilisations.

Une preuve de l’importance de l’ambiance pour le développement équilibré de la vie naturelle et surnaturelle est fournie par la sagesse avec laquelle Dieu a ordonné la grande ambiance du créé en laquelle nous sommes immergés, formée par les êtres vivants qui nous entourent: plantes, animaux, et qui a au sommet de la création l’homme, image et ressemblance de Dieu.

L’interprétation et les commentaires des physionomies d’hommes exceptionnels, de saints ou de révolutionnaires, furent en ce sens une note constante de la pensée de Plinio Corrêa de Oliveira. La façon d’être d’un homme s’exprime de fait dans la physionomie, l’allure, les traits, et même dans les vêtements dont les mutations sont liées au cours de l’histoire à celles des personnalités et des types humains. “La société parle, pour ainsi dire, - affirme Pie XII - par le vêtement qu’elle porte; par le vêtement, elle révèle ses aspirations secrètes et elle se sert de lui, au moins en partie, pour édifier ou détruire son avenir”.

Puisqu’un vêtement doit être en accord avec la circonstance et la personne qui le porte - note quant à lui le penseur brésilien - chez un homme éminent il doit s’accorder avec sa distinction. Mais Dieu n’a pas, comme enfants, que des hommes éminents. Tout homme, si modeste soit-il, a une dignité propre, naturelle, inaliénable; mais la dignité du dernier et du plus effacé des enfants de l’Eglise est incomparablement plus grande que celle-là, puisqu’il est chrétien, baptisé et donc membre du Corps Mystique de Notre Seigneur Jésus Christ.

Ainsi, c’est par l’art, par l’urbanisme, par l’architecture, que s’expriment un ensemble d’idées, de tendances, d’aspirations et d’attitudes psychologiques. Au vieil ordre médiéval, qui exprimait dans l’architecture gothique l’harmonie de la philosophie scolastique, il confronte la Babel moderne.

?Le grouillement spécifique des immenses villes modernes, le bruit des machines, le brouhaha des voix des hommes en quête d’or et de plaisirs - de ces hommes qui ne savent plus marcher mais seulement courir; qui ne savent travailler sans s’exténuer; qui n’arrivent pas à dormir sans somnifères, ni à se divertir sans excitants; dont le rire est un gloussement frénétique et triste; qui ne savent plus apprécier les harmonies et la vraie musique à cause des cacophonies du jazz - tout cela est de l’excitation, au milieu du désordre de cette société qui ne retrouvera la vraie paix que lorsqu’elle aura retrouvé le vrai Dieu.

Comme les vêtements, le langage, les gestes, les rites, sont aussi des éléments d’une grande importance culturelle et pédagogique pour le bien commun des peuples. Il y a une “liturgie” sociale naturelle qui s’exprime dans l’ordre et le faste.

Sur le firmament de l’Eglise se concilient harmonieusement des extrêmes apparemment contradictoires comme la vocation solitaire du moine, inspirée par un total renoncement au monde, et la splendeur des cérémonies pontificales qui manifestaient autrefois le plus grand faste dont le monde fût capable.

Non, entre un ordre de valeurs et un autre il n’y a de contradiction que dans l’esprit égalitaire soumis à la Révolution. L’Eglise, quant à elle, est sainte et se présente comme telle. Elle est parfaite, parce qu’elle sait organiser et stimuler, de son génie surnaturel, les vertus du moine qui rayonnent de sa vie vouée à l’obscurité, et celles qui scintillent dans le cérémonial sublime de la papauté. Plus encore. Ces deux ordres s’équilibrent. Nous pourrions peut-être dire qu’un extrême (dans le bon sens du mot) compense l’autre et que les deux s’harmonisent entre eux. Le fond doctrinal sur lequel ces deux extrêmes se touchent et s’harmonisent est très clair.
Dieu Notre Seigneur nous a donné les créatures afin qu’elles nous servent d’intermédiaires pour arriver à sa connaissance. Aussi, il faut que l’art et la culture, inspirés par la foi, mettent en évidence toutes les beautés de la création irrationnelle, ainsi que les splendeurs du talent et de la vertu de l’âme humaine. Nous appelons cela culture et civilisation chrétiennes. Elles forment les hommes dans la vérité et dans la beauté, dans l’amour du sublime, de la hiérarchie et de l’ordre qui reflètent la perfection de Celui qui créa l’univers. Par conséquent, les créatures nous servent réellement d’aides pour notre salut et concourent à la gloire divine. Mais, par contre, elles sont contingentes, éphémères: Dieu seul est absolu et éternel. Rappelons-le, parce qu’il est bon de s’éloigner des êtres créés, avec mépris, pour ne penser qu’au Seigneur. Considérer tout ce que sont les créatures, nous fait monter jusqu’à Dieu. Considérer tout ce que les créatures ne sont pas, nous fait arriver aussi à Dieu. L’Eglise invite ses enfants à emprunter simultanément l’une et l’autre de ces voies. Considérons donc à la fois le spectacle sublime des pompes ecclésiastiques et les admirables renonciations qu’elle seule sait inspirer et mener à sa réalisation.

13. La Contre-Révolution et la Civilisation chrétienne.

Plinio Corrêa de Oliveira ne se limite pas dans son chef-d’oeuvre à une implacable dénonciation du mal; il cherche aussi à délimiter l’unique thérapie qui puisse le vaincre. Si l’essence de l’esprit révolutionnaire consiste dans la haine métaphysique pour toute inégalité et toute loi, le contre-révolutionnaire trouvera la force surtout dans l’amour métaphysique pour la vérité, l’inégalité et la loi morale.

Si la Révolution est le désordre, - écrit le penseur brésilien - la Contre-Révolution est la restauration de l’Ordre. Et par Ordre, nous entendons la paix du Christ dans le Règne du Christ, c’est-à-dire la Civilisation chrétienne, austère et hiérarchique, fondamentalement sacrale, antiégalitaire et antilibérale.

La Contre-Révolution n’est pas un retour au passé, ni une vague réaction, mais une action menée contre la Révolution telle qu’elle existe aujourd’hui in concreto et donc contre les idées révolutionnaires telles qu’elles sont exprimées aujourd’hui, contre les passions révolutionnaires telles qu’elles sévissent aujourd’hui, contre les milieux révolutionnaires tels qu’ils se présentent aujourd’hui.

Ainsi la Contre-Révolution, comme la Révolution, est-elle un processus qui connaît diverses phases et vitesses. Dans l’itinéraire de l’erreur à la vérité ne sont cependant pas admissibles les frauduleuses métamorphoses de la Révolution. Si la Révolution dissimule à ses propres adeptes sa fin ultime, le progrès dans le bien s’obtient d’hommes qui le font connaître et aimer dans son intégralité. La Contre-Révolution n’est “conservatrice” que s’il s’agit de conserver du présent ce qui est bon et mérite de subsister; elle est “traditionaliste” mais elle n’a rien en commun avec le pseudo-traditionalisme qui conserve certains styles et usages en vertu seulement d’un amour archéologique pour les formes antiques. Le vrai apôtre contre-révolutionnaire doit faire siennes les normes établies par saint Pie X, selon lesquelles les catholiques ne doivent pas “couvrir quelquefois, comme d’un voile, certaines maximes fondamentales de l’Evangile, par crainte qu’on refuse de les écouter et de les suivre”, même si, ajoutait le saint Pontife, “il n’est certes pas étranger à la prudence avancer petit à petit dans la même proposition de la vérité quand on a affaire à des hommes qui nous sont étrangers et qui sont loin de Dieu”.

A l’heure actuelle, conclut Plinio Corrêa de Oliveira, est contre-révolutionnaire celui qui:

  1. Connaît la Révolution, l’Ordre et la Contre-Révolution dans leur esprit, leurs doctrines et leurs méthodes respectives.
  2. Aime la Contre-Révolution et l’Ordre chrétien, hait la Révolution et l’ ‘anti-ordre’.
  3. Fait de cet amour et de cette haine l’axe autour duquel gravitent tous ses idéaux, ses préférences et ses activités.

14. La force de propulsion de la Contre-Révolution.

Si la plus puissante force de propulsion de la Révolution est le dynamisme des passions humaines, déchaînées par une haine métaphysique contre Dieu, contre la Vérité et contre le Bien, il existe une dynamique contre-révolutionnaire symétrique qui aspire à régler les passions en les subordonnant à la volonté et à la raison. La force propulsive de la Contre-Révolution réside dans la vigueur spirituelle de l’homme chez qui Dieu gouverne la raison, la raison domine la volonté et cette dernière triomphe de la sensibilité. Cet homme est serviteur de Dieu et, à cause de cela, maître de soi.

Une telle vigueur spirituelle ne peut être conçue si l’on fait abstraction de la vie surnaturelle qui élève l’homme au-dessus des misères de la nature déchue. C’est en cette force spirituelle que Plinio Corrêa de Oliveira voit le dynamisme le plus profond de la Contre-Révolution.

L’on peut se demander de quelle valeur est fait ce dynamisme. Nous répondons qu’en principe, il est incalculable et certainement supérieur à celui de la Révolution: ‘omnia possum in eo qui me confortat’ (Phil. 4, 13).
Quand les hommes se décident à coopérer avec la grâce de Dieu, ce sont les merveilles de l’histoire qui alors s’opèrent: c’est la conversion de l’Empire romain, c’est la formation du Moyen Age, c’est la reconquête de l’Espagne à partir de Covadonga, ce sont tous ces événements qui se produisent comme le fruit de grandes résurrections de l’âme dont les peuples sont aussi capables. Résurrections invincibles, parce que rien ne peut vaincre un peuple vertueux qui aime vraiment Dieu.

15. La Contre-Révolution et l’Eglise.

Si la Révolution est un processus qui vise à détruire tout l’ordre temporel chrétien, il est clair que sa dernière cible est l’Eglise Corps Mystique du Christ, maîtresse infaillible de la Vérité, tutrice de la loi naturelle et ainsi l’ultime fondement de l’ordre temporel même. La Révolution est un ennemi qui s’est levé contre l’Eglise afin d’empêcher sa mission de salut des âmes qu’elle exerce non seulement par son pouvoir spirituel direct, mais aussi par son pouvoir temporel indirect. La Contre-Révolution qui se dresse en défense de l’Eglise n’est pas destinée à sauver l’Epouse du Christ. Appuyée sur la promesse de son Fondateur, celle-ci n’a pas besoin des hommes pour survivre. C’est au contraire l’Eglise qui donne la vie à la Contre-Révolution qui, sans elle, ne serait ni faisable ni même concevable.

Dans la perspective de Plinio Corrêa de Oliveira, la Contre-Révolution n’est pas une fin en elle-même mais un instrument docile de l’Eglise. L’Eglise à son tour ne s’identifie pas avec la Contre-Révolution, ni n’a besoin d’être sauvée par celle-ci.

L’Eglise est l’âme de la Contre-Révolution. Si la Contre-Révolution est la lutte pour anéantir la Révolution et construire la Chrétienté de demain, toute resplendissante de foi, d’humble esprit hiérarchique et de pureté immaculée, il est clair que cela se fera surtout par une action profonde dans les coeurs. Or cette action est l’oeuvre propre de l’Eglise qui enseigne la doctrine catholique et la fait aimer et pratiquer. L’Eglise, par conséquent, est l’âme même de la Contre-Révolution.

L’exaltation de l’Eglise est l’idéal de la Contre-Révolution.

Si la Révolution est le contraire de l’Eglise, il est impossible de haïr la Révolution (considérée globalement, et non sous quelque aspect isolé) et de la combattre, sans avoir ipso facto pour idéal l’exaltation de l’Eglise.

L’Eglise est donc une force fondamentalement contre-révolutionnaire, mais elle ne s’identifie pas avec la Contre-Révolution: sa vraie force est d’être le Corps Mystique de Notre Seigneur Jésus-Christ.

Néanmoins, le domaine de la Contre-Révolution va outre, en un certain sens, le domaine de l’Eglise, parce qu’il envisage une réorganisation de toute la société temporelle depuis ses fondements. Cette restauration sociale est inspirée par la doctrine de l’Eglise, mais elle implique d’autre part d’innombrables aspects concrets et pratiques qui regardent proprement l’ordre civil.

A ce titre, la Contre-Révolution dépasse la sphère d’action de l’Eglise, tout en restant toujours profondément soumise au Magistère et au pouvoir indirect de celle-ci.

L’oeuvre de Plinio Corrêa de Oliveira se conclut par un hommage de dévotion filiale et d’obéissance sans limites au “doux Christ sur terre”, tête et fondement de l’infaillible vérité, Sa Sainteté Jean XXIII, et par une consécration filiale de l’ouvrage à la Sainte Vierge:

Le serpent dont la tête fut écrasée par la Vierge Immaculée, fut le premier et est le grand révolutionnaire, inspirateur et fauteur suprême de cette Révolution comme de celles qui l’ont précédée et de celles qui la suivront. Marie est pa conséquent, la Protectrice de tous ceux qui luttent contre la Révolution.
La médiation universelle et toute-puissante de la Mère de Dieu est la plus grande raison d’espérance des contre-révolutionnaires. Et à Fatima, Elle leur a déjà donné la certitude de la victoire, quand Elle annonça que, même après une irruption éventuelle du communisme dans le monde entier, “Finalement mon Coeur Immaculé Triomphera”.
Que la Vierge daigne donc accepter cet hommage filial, tribut d’amour et expression de confiance absolue dans son triomphe.

16. Au-delà des frontières du Brésil: une école de pensée et d’action.

Certains des thèmes abordés par Plinio Corrêa de Oliveira furent traités aussi par d’autres penseurs catholiques contemporains, définis d’une manière générale comme “traditionalistes”. Qu’il suffise ici de citer les noms du philosophe belge Marcel De Corte, du fondateur de la “Cité Catholique” Jean Ousset, du philosophe italien Augusto Del Noce, de l’historien suisse Gonzague de Reynold, du penseur espagnol Francisco Elías de Tejada.

Cependant Révolution et Contre-Révolution ne fut pas seulement une oeuvre intellectuelle, mais aussi le germe vital d’un mouvement destiné à se développer et à s’étendre dans le monde entier. Plinio Corrêa de Oliveira se distingue des nombreux intellectuels traditionalistes contemporains justement par le rôle qu’il attribua à la pensée vécue, destinée à se communiquer à travers l’action personnelle et à s’organiser dans l’apostolat de conquête. Cette union inédite de la pensée et de l’action ne fut pas comprise par certains milieux traditionalistes, habitués à concilier la doctrine contre-révolutionnaire avec une praxis politique inspirée de diverses théories. Ceci survint surtout en France, après l’expérience de l’Action Française.

La France, fille aînée de l’Eglise, a été la patrie de la Contre-Révolution catholique où se sont exprimés ses génies les plus pénétrants, du père Pierre de Clorivière à Mgr Henri Delassus. Mais entre la fin du XIXe siècle et le début du XXe siècle, sous l’influence de Charles Maurras et avec la naissance de l’Action Française, fut opéré un “tournant” dans la pensée traditionaliste française dans un sens positiviste et naturaliste. Un de ses représentants, Louis Dimier, au cours de ses leçons tenues en 1906 auprès de l’Institut d’Action Française, comptait parmi les “maîtres de la contre-révolution” des auteurs comme Sainte-Beuve, Balzac, Taine, Renan, et jusqu’au socialiste Proudhon. Durant ces mêmes années, se développait à l’intérieur de l’Eglise le modernisme social du Sillon condamné par saint Pie X. L’analogie entre le modernisme et l’Action Française n’a pas échappé à un auteur contre-révolutionnaire comme Augustin Cochin qui l’a ainsi résumée:

Le moderniste, poussant au bout du mouvement, voudrait mettre l’Eglise à la place de Dieu. Et aujourd’hui même, il en est qui mettent le corps avant l’esprit, l’ordre avant le but: M. Maurras défend le corps pour l’ordre qu’il représente; M. Le Roy compromet l’esprit; c’est la même doctrine: intellectuelle chez M. Le Roy, matérialiste chez Maurras”.

Initialement certains catholiques contre-révolutionnaires, comme le Père de Pascal et Dom Besse, collaborèrent avec l’Action Française dont ils appréciaient le dynamisme et l’efficacité dans l’intervention. Mais il s’agissait alors d’une collaboration sur le strict plan de la praxis, conditionnée à la fidélité du mouvement à l’Eglise. Mais l’Action Française, dans son évolution de l’état de mouvement politique à celui d’école de pensée, fit prévaloir la doctrine maurrassienne sur la doctrine contre-révolutionnaire.

L’attitude prudente de saint Pie X, qui résuma son jugement sur les écrits de Maurras dans la formule damnabiles sed non damnandos, constitue un indiscutable point de référence. Ce Pape approuva la condamnation de Maurras, mais il en renvoya la promulgation publique, la jugeant inopportune à l’heure d’un conflit ouvert avec le gouvernement français. Les partisans de Maurras mirent l’accent sur le second terme de la formule, qui ne manifeste pourtant qu’un jugement contingent, de caractère diplomatique, désignant non un jugement de valeur mais une opportunité. Dans le damnabiles de saint Pie X, il y a toute la substance d’un clair jugement doctrinal qui ne permet aujourd’hui à aucun catholique de se réclamer de Maurras comme d’un maître.

Le jugement de Plinio Corrêa de Oliveira sur l’Action Française, formulé plusieurs fois dans le “Legionário”, fut en cohérence avec la position du Magistère du Saint-Siège. Entre la doctrine de l’Eglise et celle professée par les chefs de l’Action Française, au-delà des affinités et des convergences sur le plan de la stricte politique, existait une incompatibilité de fond.

A côté du préjudice maurassien, se manifestait dans certains milieux de la culture traditionaliste française de l’après-guerre un relent de vieilles erreurs comme le jansénisme et le gallicanisme, hostiles à cet esprit catholique romain qui est avant tout universalité et capacité de comprendre le bien, en quelque lieu que celui-ci se manifeste et selon les manières légitimes propres à chaque réalité. Mais ce qui a caractérisé de tels milieux, c’est avant tout une mentalité défaitiste qui ne pouvait que mal se concilier avec les thèses combatives et porteuses d’espérance de Révolution et Contre-révolution.

Si singulier que cela puisse paraître, outre la péninsule ibérique, c’est surtout en Italie, pays pourtant privé de culture traditionaliste au sens strict du terme, que Révolution et Contre-Révolution eut en Europe son influence la plus profonde.

La pensée contre-révolutionnaire européenne résumait de fait sa vision dans la formule “le Trône et l’Autel”, ou bien dans la fidélité à l’Eglise et aux dynasties qui, dans le cours de l’histoire, incarnèrent la tradition catholique. En Italie pourtant, après la liquidation par le Piémont des dynasties pré-unitaires et l’invasion de Rome qui lui succéda en 1870, le fossé qui s’était creusé entre la Papauté et la Maison de Savoie n’avait pas laissé d’espace pour un légitimisme contre-révolutionnaire. Aussi, après la chute de la monarchie, les monarchistes s’en tinrent-ils à des positions libéralo-nationalistes, tandis que les catholiques furent déviés vers la Démocratie Chrétienne, responsable du glissement à gauche du monde catholique de l’après-guerre. De cette façon, il manqua, sur la terre choisie par la Providence afin d’y poser la Chaire de Pierre, une action politique authentiquement catholique, et le Parti Communiste le plus fort et le plus organisé d’Occident, suivant les leçons d’Antonio Gramsci, put y développer cette statégie du compromis historique qui a eu pour résultat, en mai 1996, la conquête du pouvoir de la part des néo-communistes.

Tandis que l’Italie était envahie par le vent de la contestation, naquit autour des principes de Révolution et Contre-Révolution, oeuvre traduite et publiée à Plaisance par les soins de Giovanni Cantoni, le groupe Alleanza Cattolica (Alliance Catholique) et, en 1973, la revue “Cristianità”. Par la suite, d’autres groupes et mouvements s’inspirèrent de Révolution et Contre-Révolution, parmi lesquels le Centro Culturale Lepanto (Centre Culturel Lépante), fondé à Rome en 1982.

17. Noblesse et élites traditionnelles analogues face à la IVe Révolution.

L’ouvrage Noblesse et élites traditionnelles peut être considéré comme la continuation et le développement de Révolution et Contre-révolution.

Dans l’essai intitulé Révolution et Contre-Révolution vingt ans après, Plinio Corrêa de Oliveira décrit l’apparition, après la Révolution communiste, d’une IVe Révolution moins idéologique et plus tendancielle qui programme l’extinction des vieux modèles de réflexion, volition et sensibilité afin de parvenir plus rapidement au but final de la Révolution: l’instauration, sur les ruines de la Civilisation chrétienne, d’une société “tribale” et anarchique, soumise au Prince des Ténèbres. Le retour au modèle humain représenté par les “élites traditionnelles” peut constituer, selon le penseur brésilien, le principal antidote à cet extrême déclin de la société. Si, en 1968, la Révolution de la Sorbonne a été une explosion de portée universelle qui a accéléré les germes malsains de la prolétarisation de la société, l’impulsion pour un continuel perfectionnement, qui caractérisa le Moyen Age et les siècles suivants, pourrait aujourd’hui renaître si la noblesse retrouvait en lui le sens de sa propre mission historique.

Si le noble du XXe siècle entretient en lui la conviction de cette mission et si, encouragé par la foi et l’amour d’une tradition bien comprise, il fait tout pour la remplir, il obtiendra une victoire dont la grandeur ne sera pas moindre que celle de ses ancêtres qui continrent les barbares, repoussèrent l’Islam au-delà de la Méditerranée et, sous le commandement de Godefroy de Bouillon, enfoncèrent les portes de Jérusalem.

Dans la conclusion de son dernier livre, Plinio Corrêa de Oliveira décrit ainsi la funeste issue du long processus révolutionnaire:

Malgré d’innombrables obstacles, sa marche victorieuse - à partir de l’époque historique au cours de laquelle décline et meurt le Moyen Age, la Renaissance surgit avec ses joyeux triomphes originels, suivie de la révolution religieuse du protestantisme, qui commence à fomenter et préparer de loin la Révolution française, et de très loin la révolution russe de 1917 - la marche victorieuse de ce processus révolutionnaire est marquée d’une telle inflexibilité que sa force motrice semble invincible, et définitifs les résultats qu’elle a entraînés.
‘Définitifs’ en effet, paraîtront-ils, sans une soigneuse analyse du caractère de ce processus. Celui-ci se présente à première vue comme éminemment constructif, car il élève successivement trois édifices: la pseudo-Réforme protestante, la république libérale démocratique, la république socialiste soviétique.
Son caractère est en réalité essentiellement destructif. Il est même la Destruction. Il a jeté à terre le Moyen Age chancelant, l’Ancien Régime évanescent, le monde bourgeois apoplectique, frénétique et agité; sa pression a fait tomber en ruines l’ex-URSS, sinistre, mystérieuse, pourrie comme un fruit tombé depuis longtemps de l’arbre.
Hic et nunc, n’est-il pas vrai que les jalons de ce processus se réduisent à des ruines? De la plus récente - l’ex-URSS - quelle conséquence résulte-t-il pour le monde, si ce n’est l’exhaltation d’une confusion générale présageant à tout moment des catastrophes imminentes et contradictoires, qui s’évanouissent dans les nuages les unes après les autres sans s’être abattues sur les mortels mais qui éveillent d’autres perspectives de catastrophes, encore plus imminentes et encore plus contradictoires? Ces dernières s’évaporeront-elles à leur tour pour donner naissance à de nouveaux monstres? Ou bien se métamorphoseront-elles en réalités atroces, comme la migration de hordes entières de Slaves de l’Est à l’Ouest, ou la progression de hordes musulmanes du Sud vers le Nord?
Qui peut le savoir? Qui pourrait affirmer que ce ne sera que (!) cela, que ce ne sera pas pire?
Ce tableau a de quoi décourager les hommes sans foi. Au contraire, pour ceux qui ont la foi, du fond de ce sinistre horizon, confus et trouble, une voix se fait entendre, capable d’éveiller la confiance la plus déterminée: ‘A la fin, mon Coeur Immaculé triomphera’”.

18. Le jugement d’un éminent théologien contemporain sur Révolution et Contre-Révolution.

Parmi les jugements formulés sur Révolution et Contre-Révolution,  celui du Père Anastasio Gutiérrez, éminent canoniste de l’ordre clarétin et consultant de plusieurs dicastères du Vatican est étendu et profond. Il écrit entre autre:

“Révolution et Contre-Révolution est une oeuvre magistrale dont l’enseignement devrait pénétrer la conscience de tous ceux qui se sentent vraiment catholiques - j’oserais même dire, de tous les hommes de bonne volonté. Elle leur apprendrait que Notre Seigneur Jésus-Christ et son Eglise représentent le seul salut. Ils se sentiraient confirmés et revigorés dans la Foi, avertis et immunisés psychologiquement et spirituellement contre un processus astucieux qui les utilise comme compagnon de route.
L’analyse qu’elle fait du processus révolutionnaire, par son réalisme et sa profonde connaissance de l’Histoire, est impressionnante et révélatrice. Le Moyen Age, dans sa phase décadente, prépare un climat psychologique favorable à la Renaissance et à la Pseudo-réforme; celle-ci mène à la Révolution française et peu après au communisme athée. 
Ce livre ne fait pas cette analyse uniquement sur le plan des événements. Il explique aussi l’action et la réaction des éléments psychologiques des hommes et des masses. Il faut reconnaître qu’il y a bien quelqu’un qui dirige cette déchristianisation de fond et systématique. Certes, l’homme tend vers le mal, l’orgueil et la sensualité. Mais s’il n’y avait quelqu’un qui eût dans ses mains les rênes de ces tendances désordonnées, pour les coordonner avec sagacité, elles ne produiraient probablement pas, comme résultat, une action constante, habile et systématique. Une action maintenue avec ténacité qui sait tirer parti des résistances rencontrées et des ‘réactions’ naturelles des forces qui lui sont adverses. 
C’est avec précaution que l’ouvrage prévoit, à titre d’hypothèse, l’évolution possible de l’action révolutionnaire et, par opposition, celle de la Contre-révolution. 
Les considérations et les observations perspicaces de caractère sociologique, politique, psychologique abondent. 
Elles sont parsemées tout au long du livre, et quelques unes sont dignes d’une anthologie. Plusieurs désignent les ‘tactiques’ intelligentes qui favorisent la Révolution; d’autres désignent celles qui peuvent ou doivent être utilisées dans le cadre d’une ‘stratégie’ générale contre-révolutionnaire.
Bref, j’oserais dire qu’il s’agit d’une oeuvre prophétique dans le meilleur sens du mot. Aussi son contenu devrait-il être enseigné dans les centres de formation supérieurs de l’Eglise, afin que les élites, au moins, prennent connaissance d’une réalité accablante, laquelle, je crois, n’est en général pas claire pour les consciences. (...) L’ouvrage est le résultat notoire de la ‘sapientia christiana’”.

Soucer : Le Croisé du XXe siècle Plinio Corrêa de Oliviera - livre écrit par le Prof. Roberto de Mattei.

[1] P. Corrêa de Oliveira, Revolução e Contra-Revolução, Bôa Imprensa Ltda., Campos 1959. L’oeuvre eut quatre éditions au Brésil et de nombreuses autres dans le monde hispanique, aux Etats Unis, au Canada, en Italie et en France (Révolution et Contre-Révolution, Editions “Catolicismo”, São Paulo 1960). Elle a été en outre diffusée en Australie, en Afrique du Sud et aux Philippines.

[1] Cf. entre autres Karl Griewank, Der neuzeitliche Revolutionsbegriff. Entstehung und Entwicklung, Europäische Verlagsanstalt, Frankfurt a. Main 1969; Jean Baechler, Les phénomènes révolutionnaires, PUF, Paris 1970; Roman Schnur, Revolution und Weltbürgerkrieg, Duncker u. Hamblot, Berlin 1983; L’Europa moderna e l’idea di Rivoluzione, aux soins de Carlo Mongardini et Maria Luisa Maniscalco, Bulzoni, Roma 1990; Charles Tilly, European Revolutions 1492-1992, Blackwell, Oxford 1993.

[1] A. Del Noce, Lezioni sul marxismo, Giuffré, Milano 1972, p. 8.

[1] A. Del Noce, Tramonto o eclissi dei valori tradizionali, Rusconi, Milano 1971, p. 156.

[1] Hannah Arendt, Essai sur la Révolution, Gallimard, Paris 1985, p. 9.

[1] Id., p. 10.

[1] François Arouet de Voltaire, Lettre à Gabriel-Henri Gaillard du 2 mars 1769, dans Correspondance, aux soins de Théodore Besterman, Gallimard, Paris 1985, vol. IX, p. 810.

[1] Sur la Révolution française, en plus de la synthèse classique de Pierre Gaxotte, La Révolution française, aux soins de Jean Tulard, Complexe, Bruxelles 1988, cf. la réédition des études de Augustin Cochin (1876-1916), La Révolution et la libre pensée, Copernic, Paris 1976 (1924) et Les sociétés de pensée et la démocratie moderne, Copernic, Paris 1978 (1925), qui ont influencé la “révision” historique de François Furet, Penser la Révolution française, Gallimard, Paris 1988; F. Furet, Mona Ozouf (aux soins de), Dictionnaire critique de la Révolution française, Flammarion, Paris 1988. Sur les origines culturelles: Daniel Mornet, Les origines intellectuelles de la Révolution, Colin, Paris 1933; P. Hazard, La crise de la conscience européenne au XVIIIe siècle, de Montesquieu à Lessing, Boivin, Paris 1946, 3 vol.; Bernard Groethuysen, Philosophie de la Révolution française, Gallimard, Paris 1956; Ernst Cassirer, La philosophie des lumières, tr. fr. Presses Pocket, Paris 1986. Sur l’aspect religieux, cf. l’oeuvre importante de Jean de Viguerie, Christianisme et Révolution, Nouvelles Editions Latines, Paris 1986.

[1] Une exposition organique et approfondie sur la pensée de la Contre-Révolution n’existe pas. Les auteurs suivants traitent ce thème avec une hétérogénéité de positions: Fernand Baldensperger, Le mouvement des idées dans l’émigration française (1789-1815), Plon, Paris 1925, 2 vol.; Dominique Bagge, Les idées politiques en France sous la Restauration, PUF, Paris 1952; Jean-Jacques Oeschlin, Le mouvement ultra-royaliste sous la Restauration: son idéologie et son action politique (1814-1830), Librairie générale de Droit et de Jurisprudence, Paris 1960; Jacques Godechot, La contre-révolution, doctrine et action (1789-1804), PUF, Paris 1961; R. Rémond, Les Droites en France, Aubier Montaigne, Paris 1982; Stéphane Rials, Révolution et Contre-Révolution au XIX siècle, Albatros, Paris 1987; E. Poulat, Antireligion et Contre-Révolution, dans id., L’antimaçonnisme catholique, Berg International, Paris 1994. Est en outre très utile la série d’articles écrits par le Pr. F. Furquim de Almeida sur Os católicos franceses no século XIX, dans “Catolicismo”, du n. 1 (janvier 1951) au n. 80 (août 1957).

[1] Les écrits du comte Joseph de Maistre (1753-1821) sont recueillis dans les Oeuvres complètes contenant ses oeuvres posthumes et toute sa correspondance inédite, Vitte et Perrussell, Lyon 1884-1886, 14 vol.; éd. ne varietur, ibidem 1924-1928. Malgré l’abondance de la bibliographie sur l’auteur, il manque une étude exhaustive sur de Maistre. Pour une introduction cf. le volume Joseph de Maistre tra Illuminismo e Restaurazione, aux soins de Luigi Marino, Centro Studi Piemontesi, Torino 1975 et Domenico Fisichella, Il pensiero politico di de Maistre, Laterza, Roma-Bari 1993.

[1] Du Père Pierre Joseph Picot de Clorivière (1735-1820), cf. les Etudes sur la Révolution, dans Pierre de Clorivière, contemporain et juge de la Révolution, aux soins et avec une introduction de René Bazin, J. de Gigord, Paris 1926 (aujourd’hui P. de Clorivière, Etudes sur la Révolution, Fideliter, Escurolles 1988). Cf. aussi Pierre Monier-Vinard s.j., Clorivière, dans DSp, vol. II (1953), col. 974-979. Clorivière fut le dernier jésuite à avoir prononcé ses voeux solennels en France avant la suppression de la Compagnie de Jésus et il en sera le restaurateur après 1814. Sa cause en béatification a été introduite.

[1] P. de Clorivière, Etudes sur la Révolution, cit., p. 115.


[1] Sur le vicomte Louis-Ambrois de Bonald (1754-1830) dont les Oeuvres Complètes en trois volumes ont été publiées par Migne (Paris 1859), cf. le volume classique de H. Moulinié, de Bonald. La vie, la carrière politique, la doctrine, F. Alcan, Paris 1916; cf. aussi Robert Spaemann, Der Ursprung der Soziologie aus dem Geist der Restauration. Studien über L. G. A. de Bonald, Kösel, München 1959; C. Constantin, sub voce, dans DTC, vol. II,1 (1910), col. 958-961.

[1] Sur Juan Donoso Cortés marquis de Valdegamas (1809-1853), voir l’étude d’introduction de Carlos Valverde à son édition des Obras Completas, BAC, Madrid 1970, vol. I, p. 1-166 (avec une vaste bibliographie). La lettre adressée par Donoso Cortés au cardinal Fornari le 19 juin 1852 peut être considérée comme un des manifestes les plus lucides de la Contre-Révolution catholique du XIXe siècle. Le texte original se trouve dans les Obras Completas, cit., vol. II, p. 746-762; l’édition française, Lettre au Cardinal Fornari, traduite et annotée par André Coyne, L’Age d’Homme, Lausanne 1989.

[1] Karl Ludwig von Haller (1768-1854) est l’auteur de la Restauration der Staats-Wissenschaft, oder Theorie des natürlich geselligen Zustands; der Chimäre des Küstlich-bürgerlichen entgegensetzt, Steiner, Winterthur 1816-1834, 6 vol. L’oeuvre fut traduite en France entre 1824 et 1830, en 3 vol. Sur Haller, cf. Michel de Preux, Charles-Louis von Haller. Un légitimiste suisse, A la Carte, Sierre 1996.

[1] Du Cardinal Edouard-Louis Pie (1815-1880) cf. les Oeuvres de Monseigneur l’Evêque de Poitiers (10 éditions, la dernière à Paris, J. Ledars 1890-1894, 10 vol.). Cf. aussi Mgr Louis Baunard, Histoire du Cardinal Pie, Evêque de Poitiers, Oudin, Poussielgue 1886, 2 vol., et les études de Etienne Catta, La doctrine politique et sociale du Cardinal Pie, Nouvelles Editions Latines, Paris 1959 et de Théotime de Saint-Just, La royauté sociale de Notre-Seigneur Jésus-Christ, d’après le Cardinal Pie, Ed. Sainte Jeanne d’Arc, Chiré-en-Montreuil 1988.

[1] Mgr Charles Freppel (1827-1891) fut consulteur au Concile Vatican I où il soutint l’infaillibilité pontificale et, à partir de 1869, évêque d’Angers où il fonda en 1875 l’Université Catholique. Cf. ses Oeuvres polémiques, en 10 vol. (Palme, Paris 1874-1878) et La Révolution française, Trident, Paris 1987 (Roger et Chernovitz 1889).

[1] Mgr Henri Delassus (1836-1921), ordonné prêtre en 1862, exerça son ministère à Lille où, à partir de 1874, il fut propriétaire, directeur et principal rédacteur de la Semaine religieuse du diocèse de Cambrai qui, avec la création du diocèse de Lille, prit le nom de Semaine religieuse du diocèse de Lille et “dont il fit un des bastions de la lutte contre le libéralisme, le modernisme et toutes les formes de la ‘conspiration anti-chrétienne dans le monde’” (E. Poulat, Intégrisme et catholicisme intégral, Casterman, Tournai 1969, p. 258-259). Il fit partie du Sodalitium Pianum et saint Pie X l’éleva à la dignité de prélat domestique en 1904, de protonotaire apostolique en 1911 et de doyen du chapitre de la cathédrale de Lille en 1914, en reconnaissant, à l’occasion de son jubilé sacerdotal, son zèle à défendre la doctrine catholique (S. Pie X, Actes, cit., vol. VII, p. 238). Ses principales oeuvres sont Le problème de l’heure présente, cit., repris dans La conjuration antichrétienne: le temple maçonnique voulant s’élever sur les ruines de l’Eglise catholique (Desclée, Paris 1910, 3 vol., avec une préface du Cardinal Rafael Merry del Val).

[1] Dom Jean Martial Besse, L’Eglise et les libertés, Nouvelle Librairie Nationale, Paris 1913, p. 53.

[1] Cf. Peter Viereck, Conservatism, dans EB, vol. 27 (1986), p. 476-484; id., Conservatism from John Adams to Churchill, Greenwood Press, Westport 1978; John Weiss, Conservatism in Europe, 1770-1945, Thames and Hudson, London 1977; Klaus Epstein, The Genesis of German Conservatism, Princeton University Press, Princeton 1966.

[1] La naissance officielle du mouvement conservateur international remonte à la publication en 1790, de l’oeuvre de Edmund Burke (1729-1797), Reflections on the Revolution in France. Sur Burke la littérature est très vaste. Nous nous limitons à signaler les oeuvres de Alfred Cobban, E. Burke and the Revolt against the Eighteenth Century, Allen and Unwin, London 1978 (2e éd.) et récemment Crawford B. Macpherson, Burke, Oxford University Press, New York 1980; Michael Freeman, Edmund Burke and the critique of political radicalism, Basil Blackwell, Oxford 1980.


[1] Sur Louis Veuillot cf. note 41 du chapitre II et, parmi les oeuvres, L’illusion libérale, dans Oeuvres, cit., vol. 10, p. 315-361.

[1] St. Antoine Marie Claret (1807-1870). Fondateur de la Congrégation des Missionnaires Fils du Coeur Immaculé de Marie, archevêque de Cuba (1849-1857), confesseur de la Reine Isabelle II à Madrid, puis parmi les protagonistes du Concile Vatican I où il défendit l’infaillibilité pontificale. Il fut béatifié en 1934 par Pie XI et canonisé le 7 mai 1950 par Pie XII. Cf. Escritos autobiograficos y espirituales, BAC, Madrid 1959; Giuseppe Maria Viñas, Claret, dans BSS, vol. II (1962), col. 205-210.

[1] Sur le Cardinal Henry Edward Manning (1808-1892), cf. David Newsome, The convert cardinals: John Henry Newman and Hery Edward Manning, Murray, London 1993.

[1] Sur le Père oratorien Frederick William Faber (1814-1863), cf. R. Chapman, Father Faber, Burn and Oates, London 1961.

[1] Gabriel Garcia Moreno (1821-1875), conclut durant sa présidence un concordat avec le Saint-Siège (1863) considéré comme le modèle des concordats catholiques du XIXe siècle. Il consacra la république de l’Equateur au Sacré Coeur (1873). “Son existence fut une bataille continuelle contre les forces politiques adverses qui tendaient à la déchristianisation, et pour ce il fut l’objet d’une haine profonde de la part de ses ennemis qui le firent assassiner à la porte de la cathédrale de Quito” (Silvio Furlani, sub voce, dans DTC, vol. V (1950), col. 1936). Cf. aussi Alphonse Berthe c.ss.r., Garcia Moreno. Président de l’Equateur, vengeur et martyr du droit chrétien, Téqui, Paris 1926, 2 vol.

[1] Sur la Chrétienté médiévale et l’idée chrétienne en général cf.: Bernard Landry, L’idée de chrétienté chez les scholastiques du XIIIe siècle, Paris 1929; Alois Dempf, Sacrum Imperium, Oldenbourg, München-Berlin 1929; Jean Rupp, L’idée de chrétienté dans la pensée pontificale des origines à Innocent III, Les Presses Modernes, Paris 1939; Raoul Manselli, La “Christianitas” medievale di fronte all’eresia, dans Concetto, storia, miti e immagini del medioevo, aux soins de Vittore Branca, Sansoni, Firenze 1973, p. 91-133; Luigi Prosdocimi, Cristianità medievale e unità giuridica europea, dans Aa. Vv., Storia d’Italia. Dalla civiltà latina alla nostra Repubblica, De Agostini, Novara 1980, vol. IV, p. 288-312 avec vaste bibliographie. Pour une vision d’ensemble de la civilisation médiévale cf. aussi Raffaello Morghen, Medioevo cristiano, Laterza,


Bari 1962; Giorgio Falco, La santa romana repubblica. Profilo storico del Medioevo, Ricciardi, Milano-Napoli 1968; Leopold Genicot, Le Moyen Age, Casterman, Tournai 1978 (3e éd.).

[1] P. Corrêa de Oliveira, O crime de Hitler, dans “O Legionário”, n. 547 (31 janvier 1943); cf. aussi id., Civilização cristã, dans “O Legionário”, n. 546 (24 janvier 1943).

[1] P. Corrêa de Oliveira, Cristandade, dans “O Legionário”, n. 732 (18 août 1946).

[1] S. Pie X, Encyclique Il fermo proposito, cit., p. 92.

[1] S. Pie X, Lettre Notre Charge Apostolique du 25 août 1910, cit., p. 127.

[1] Léon XIII, Encyclique Immortale Dei du 1er novembre 1885, dans EP, La paix intérieure des nations, cit., 107-108.

[1] P. Corrêa de Oliveira, A cruzada do século XX, cit.

[1] J. Maritain, Humanisme intégral, cit., p. 442.

[1] P. Corrêa de Oliveira, Révolution et Contre-Révolution, cit., p. 54.

[1] G. L. Burr, How the Middle Ages got their Names, dans “American Historical Review”, vol. 18 (1911-1912), p. 710 sv.; Etienne Gilson, Notes sur une frontière contestée, dans “Archives d’histoire doctrinale et littéraire du Moyen Age”, vol. 25 (1958), p. 65; Ludovico Gatto, Viaggio intorno al concetto di Medioevo, Bulzoni, Roma 1977; Pietro Zerbi, Il Medioevo nella storiografia degli ultimi vent’anni, Vita e Pensiero, Milano 1985.

[1] Francesco Petrarca fut le premier à tracer un sillon entre l’âge “antiqua”, romain, et l’âge “nova”, qui a succédé au Moyen Age (cf. Epistolae de rebus familiaribus, VI, 2; XX, 8 etc.). Wallace K. Ferguson, dans La Renaissance dans la pensée historique (trad. fr. Payot, Paris 1950), le considère comme celui qui fit “prendre corps à la notion des ‘temps obscurs’ qui allait pendant des siècles dominer l’interprétation de l’histoire médiévale et offrir à la Renaissance un arrière-fond tout en contraste avec elle” (p. 17). Cf. aussi Theodor E. Mommsen, Petrarch’s Conception of the ‘Dark Ages’, dans Medieval and Renaissance Studies, aux soins de E. F. Rice jr., Cornell University Press, New York 1959, p. 226-242; Eugenio Garin, Rinascite e rivoluzioni. Movimenti culturali dal XIV al XVIII secolo, Laterza, Bari 1976, p. 4-47.

[1] E. Garin, Rinascite e rivoluzioni, cit., p. 15.

[1] Régine Pernoud, Lumière du Moyen Age, Grasset, Paris 1944; id., Pour en finir avec le Moyen Age, Editions du Seuil, Paris 1977; Marco Tangheroni, La “leggenda nera” sul Medioevo, dans “Cristianità”, n. 34-35 (février-mars 1978), p. 6-9; Raymond Delatouche, La chrétienté médiévale, Téqui, Paris 1989; Jacques Heers, Le Moyen Age, une imposture. Vérités et légendes, Perrin, Paris 1993.

[1] Benoît XV, Encyclique Pacem Dei munus du 23 mai 1920, dans Actes, Maison de la Bonne Presse, Paris, vol. II (1926), p. 144.

[1]Nous sommes encore - a affirmé à son tour Jean-Paul II - les héritiers des longs siècles durant lesquels se forma en Europe une civilisation inspirée par le christianisme. (...) Au Moyen Age, dans une certaine cohésion du continent tout entier, l’Europe construit une civilisation lumineuse dont il reste de nombreux témoignages” (Discours à la CEE, à Bruxelles, le 21 mai 1985, dans “L’Osservatore Romano”, 22 mai 1985).

[1] P. Corrêa de Oliveira, A grande experiença de 10 anos de luta, cit.

[1] Léon XIII, Encyclique Immortale Dei, cit., p. 108

[1] Pie XII, Discours Nel contemplare du 12 octobre 1952, dans DP (1952), p. 497.

[1] P. Corrêa de Oliveira, Révolution et Contre-Révolution, cit., p. 21.

[1]De nos jours - a affirmé Jean-Paul II à Saint Domingue, le 12 octobre 1992 - on perçoit une crise culturelle de proportions insoupçonnables. Certainement, le substrat culturel d’aujourd’hui présente un bon nombre de valeurs positives, et parmi ceux-ci beaucoup sont les fruits de l’évangélisation; mais dans le même temps, on a éliminé des valeurs religieuses fondamentales et on a introduit des conceptions trompeuses, qui ne sont pas acceptables du point de vue chrétien (Jean-Paul II, Discours Nueva Evangelización, Promoción humana, Cultura cristiana. “Jesucristo ayer, hoy y siempre” du 12 octobre 1992, dans Suppl. à “L’Osservatore Romano”, n. 238, 14 octobre 1992, IV, p. 21-22).


[1] P. Corrêa de Oliveira, Révolution et Contre-Révolution, cit., p. 27.

[1] Sur le protestantisme, reste toujours fondamentale la critique de Jaime Balmes, El protestantismo comparado con el catolicismo, BAC, Madrid 1967, 2 vol. (1842-1844). L’évolution du protestantisme doit être suivie surtout dans les sectes anglaises du XVIIe siècle et dans le mouvement qui eut son issue dans la Révolution anglaise. Pour Plinio Corrêa de Oliveira, la Révolution anglaise du XVIIe siècle occupe une place saillante dans l’histoire tragique de la crise de l’Occident. “Dans ce sens, toute variation mise à part, les événements historiques se répètent en quelque sorte. Charles I préfigurait Louis XVI; Cromwell fut un précurseur de Robespierre ou de Saint-Just; et la révolution anglaise est bien une “avant-première” de la révolution française” (P. Corrêa de Oliveira, Figuras que encarnam concepções de vida, dans “Catolicismo”, n. 77 (mai 1957)). Sur les sectes protestantes en général, cf. R. de Mattei, Alta ruet Babylon. L’Europa settaria del cinquecento, IPL, Milano 1997. Parmi les critiques les plus lucides de la Révolution française les auteurs protestants ne manquent pas. Cf. Aa. Vv., Révolution et Christianisme. Une appréciation chrétienne de la Révolution française, L’Age d’Homme, Lausanne 1992 et en particulier Jean Marc Berthoud, La Révolution française et les révolutions, p. 114-163.

[1] Pour un panorama sur la Révolution française, vue dans son essence et dans ses vraies causes, à la lumière de la pensée de Plinio Corrêa de Oliveira, cf. Despreocupados... rumo à Guilhotina. A autodemolição do Ancien Régime, aux soins de J. S. Clá Dias, Edições Brasil de Amanhã, São Paulo 1993.

[1] P. Corrêa de Oliveira, Révolution et Contre-Révolution, cit., p. 21


[1] P. Corrêa de Oliveira, Révolution et Contre-Révolution, cit., p. 31.

[1] Paul Bourget, Le démon de midi, Plon, Paris 1914, vol. II, p. 375.

[1] P. Corrêa de Oliveira, Révolution et Contre-Révolution, cit., p. 41-43.


[1] P. Corrêa de Oliveira, Révolution et Contre-Révolution, cit., p. 21.

[1] H.-D. Noble, Passions, dans DTC, vol. XI,2 (1932), col. 2211-2241; Aimé Solignac, Passions et vie spirituelle, dans DSp, vol XII,1 (1984), col. 339-357. Les passions peuvent être entendues dans un sens métaphysique (cf. S. Thomas d’Aquin, Summa Theologica, I-IIae, q. 23, aa. 2-4) et dans un sens psychologique. Noble définit la passion “un acte unique de l’appétit sensitif qui comprend essentiellement une tendance affective et une réaction psychologique” (col. 2215). Cf. aussi Gérard Blais, Petit traité pratique des passions humaines, Editions Paulines, Sherbrooke (Canada) 1967; Antonin Eymieu (1861-1933), dans Le gouvernement de soi-même. Essai de psychologie pratique (Perrin, Paris 1910), établit, en recherchant les rapports entre idées, sentiments et actes, certaines grandes lois psychologiques, dont la première est que l’idée pousse à l’acte dont il est la représentation. Le second principe est que l’action suscite un sentiment dont elle devrait être l’expression normale. Le troisième principe est que la passion aiguise jusqu’au point le plus extrême et utilisera pour ses propres fins les forces psychologiques humaines.

[1] Ces tendances désordonnées produisent crises morales, doctrines erronées, et ensuite révolutions. Ces dernières entraînent à leur tour de nouvelles crises, de nouvelles erreurs, de nouvelles révolutions. Leur crescendo est analogue à celui produit par l’accélération dans la loi de gravité: elles se nourrissent de leurs propres oeuvres et produisent des conséquences qui à leur tour se développent selon une intensité proportionnelle (P. Corrêa de Oliveira, Révolution et Contre-Révolution, cit., p. 44-46).

[1] Cf. Jn. 2, 16. P. Corrêa de Oliveira, Révolution et Contre-Révolution, cit., p. 58-59.

[1] P. Corrêa de Oliveira, Révolution et Contre-Révolution, cit., p. 42-43.

[1] La première condamnation de la franc-maçonnerie remonte à la constitution In eminenti de Clément XII du 24 avril 1738. L’excommunication fut confirmée et renouvelée par Benoît XIV avec la constitution Providas du 18 mai 1751 et par Pie VII avec la constitution Ecclesiam a Jesu Christo du 13 septembre 1821. Léon XII ratifia et scella les précédents décrets avec la constitution apostolique Quo graviora du 13 mars 1825; dans le même sens s’exprimèrent Pie VIII, avec l’encyclique Traditi du 21 mai 1829, Grégoire XVI avec l’encyclique Mirari Vos du 15 août 1832, Pie IX avec l’encyclique Qui pluribus du 9 novembre 1846 et d’autres nombreux documents. Le dernier grand document des Pontifes relatif à la Maçonnerie a été l’encyclique Humanum Genus de Léon XIII du 20 avril 1884 (dans EP, Le Laïcat, cit., p. 92-95). Dès lors les Papes inclurent la condamnation dans les canons 684, 2335 et 2336 du Code de Droit Canon en vigueur de 1917 à 1983. Dans le nouveau Code de Droit Canon du 29 novembre 1983, la franc-maçonnerie n’est plus mentionnée expressément comme dans le Code antérieur. Dans un document du 26 novembre 1983, la Congrégation pour la Doctrine de la Foi a cependant répété que “le jugement négatif de l’Eglise vis-à-vis des associations franc-maçonnes ne change pas puisque leurs principes ont toujours été considérés inconciliables avec la doctrine de l’Eglise et donc l’inscription à ces associations reste interdite. Les fidèles qui appartiennent aux associations franc--maçonnes sont en état de péché grave et ne peuvent pas recevoir la Sainte Communion” (“Osservatore Romano”, 27 novembre 1983).

[1] Léon XIII, Encyclique Humanum Genus, cit.

[1] P. Corrêa de Oliveira, A Igreja e o Judaismo, dans “A Ordem”, n. 11 (janvier 1931), p. 44-52.


[1] Augustin Barruel s.j. (1741-1820), Mémoires pour servir à l’histoire du jacobinisme, Fauche, London 1797-1798 (4 vol.) - Hambourg 1789-1799 (5 vol.). Les Mémoires du P. Barruel ont été republiés par la Diffusion de la Pensée Française, Chiré-en-Montreuil 1974 avec une introduction de Christian Lagrave.

[1] Jacques Crétinau-Joly (1803-1875), historien de la Vendée et de la Compagnie de Jésus, en utilisant de la documentation reçue par le Saint Siège, fit une description, dans L’Eglise Romaine en face de la Révolution (Plon, Paris 1859, 2 vol.), de la lutte entre l’Eglise Catholique et la Révolution dans la période comprise entre le Pontificat de Pie VI et le début de celui de Pie IX. L’oeuvre a été réédité par le Cercle de la Renaissance Française (Paris 1976, 2 vol.).

[1] Nicolas Deschamps s.j. (1797-1872), Les Sociétés Secrètes et la Société ou philosophie de l’histoire contemporaine, Fr. Séguin aîné, Avignon 1854, 2 vol., puis Oudin, Paris 1882, enrichie par un troisième volume de documents et par une Introduction sur l’action des sociétés secrètes au XIXe siècle de Claude Jannet.

[1] Ernest Jouin (1884-1932) curé de l’église Saint Augustin à Paris, lança en 1912 la “Revue Internationale des Sociétés Secrètes”, la célèbre RISS (publiée jusqu’en 1939) qui, par le sérieux de sa documentation et par la compétence de ses collaborateurs, constitua un instrument d’étude de grande valeur. Cf. Joseph Sauvêtre, Un bon serviteur de l’Eglise, Mgr Jouin (1844-1932), Casterman, Paris 1936.

[1] Léon de Poncins (1897-1975), Les forces secrètes de la Révolution, Bossard, Paris 1928; avec Emmanuel Malynski, La guerre occulte, Beauchesne, Paris 1936; La Franc-maçonnerie d’après ses documents secrets, Diffusion de la Pensée Française, Chiré-en-Montreuil 1972; Christianisme et franc-maçonnerie, Diffusion de la Pensée Française, Chiré-en-Montreuil 1975.

[1] P. Corrêa de Oliveira, Révolution et Contre-Révolution, cit., p. 51. A la franc-maçonnerie et aux forces secrètes est dédiée toute une section de l’oeuvre Despreocupados rumo à Guilhotina, cit., p. 265-317.

[1] Fernando Gonzalo Elizondo, El deber cristiano de la militancía contrarivolucionaria, dans “Verbo”, n. 317-318 (septembre-octobre 1993), p. 840 (p. 825-840).

[1] P. Corrêa de Oliveira, Révolution et Contre-Révolution, cit., p. 66. “Dans cette société - qui, malgré l’absence de gouvernement vivrait en plein ordre - la production économique serait organisée et très développée, et la distinction entre le travail intellectuel et manuel, serait dépassée. Un processus de sélection encore indéterminé amènerait à la direction de l’économie les plus capables, sans provoquer la formation de classes. Telles seraient les seules et insignifiantes traces d’inégalité qui persisteraient. Mais, comme cette société communiste anarchique n’est pas le terme final de l’Histoire, il semble légitime de supposer que ces traces seraient abolies dans une évolution postérieure” (id., p. 66)

[1] P. Corrêa de Oliveira, Révolution et Contre-Révolution, cit., p. 74-75.

[1] Id., p. 76. Les prémisses “religieuses” de cette utopie sont bien décrites par Thomas Molnar dans L’utopie: éternelle hérésie, tr. fr. Beauchesne, Paris 1973.

[1] P. Corrêa de Oliveira, Révolution et Contre-Révolution, cit., p. 63.

[1] L’actus essendi, trop lumineux pour l’intelligence créée, ne peut pas constituer le terrain propre de la spéculation philosophique de l’homme, lequel a comme premier objet de connaissance les “essences”. La primauté de l’actus essendi sur l’essence est une donnée indéniable du thomisme. Mais quand l’affirmation de cette primauté conduit à une polémique exagérée contre le prétendu “essentialisme” de la scolastique, il risque de glisser vers une position de type existentialiste (cf. Cornelio Fabro c.p.s., Introduzione a San Tommaso, Ares, Milano 1983, p. 100-103).

[1] St. Thomas d’Aquin, De ente et essentia, cap. II.

[1] St. Thomas d’Aquin, Summa Theologica, I, q. 11, a. 1.

[1] St. Thomas d’Aquin, Summa contra gentiles, II, 45; Summa Theologica, I, q. 45, a. 2.

[1] St. Thomas d’Aquin, Summa Theologica, I, q. 50, a. 4.

[1] Id., I, q. 96, a. 3 et 4.

[1] P. Corrêa de Oliveira, Révolution et Contre-Révolution, cit., p. 62-63.

[1] Léon XIII peut être considéré comme le promoteur de la renaissance du thomisme dans les temps modernes, surtout avec l’encyclique Aeterni Patris du 4 août 1879 dans laquelle il déclara que saint Thomas était le seul maître officiel des écoles catholiques de tout niveau. Sur ce document important, cf. Aa. Vv., Le ragioni del tomismo. Dopo il centenario dell’enciclica Aeterni Patris, Edizioni Ares, Milano 1979.

[1] Cf. Jean-Paul II, Il Centenario dell’Aeterni Patris, Discours de l’Angelicum du 18 novembre 1979, dans “L’Osservatore Romano”, 19-20 novembre 1979.

[1] Cf. par exemple Antonin-Dalmace Sertillanges o.p., Saint Thomas d’Aquin, Alcan, Paris 1925, 4e éd. Un cas extrême de déviation du thomisme à travers l’acceptation de l’apriori de Kant et l’existentialisme de Heidegger a été celui du jésuite Karl Rahner (Geist im Welt, Rauch, Innsbruck 1939) lucidement dénoncé par le Père stigmatin Cornelio Fabro dans La svolta antropologica di Karl Rahner, Rusconi, Milano 1974. “Catolicismo” a publié en 1963 un article du Père Fabro, traduit de “L’Osservatore Romano”, dans lequel l’auteur soulignait l’impossibilité d’établir aucun lien entre la vraie philosophie chrétienne, qui ne pourra jamais renier la notion de transcendance divine, et les écoles philosophiques modernes fondées sur le “principe d’immanence” (C. Fabro c.p.s., Filosofia moderna e pensamento cristão, dans “Catolicismo”, n. 151 (juillet 1963), p. 6).

[1] Sur l’abandon de la métaphysique dans la pensée moderne, cf. C. Fabro c.p.s., Introduzione all’ateismo moderno, Studium, Roma 1969, 2 vol.; Tomas Tyn o.p., Metafisica della sostanza. Partecipazione e analogia entis, Edizioni Studio Domenicano, Bologna 1991, p. 243-384.

[1] Pie XII, Allocution aux participants au Congrès des Etudes Humanistes du 25 septembre 1949, dans DP (1949), p. 404.

[1] Pie XI, Allocution à l’Angelicum du 12 décembre 1924, dans Xenia Thomistica, Roma 1925, vol. III, p. 600.

[1] Sur cet aspect de la philosophie de saint Bonaventure, cf. J. M. Bissen o.f.m., L’exemplarisme divin selon Saint Bonaventure, Vrin, Paris 1929; E. Gilson, La philosophie de Saint Bonaventure, Vrin, Paris 1953; Efrem Bettoni o.f.m., San Bonaventura di Bagnoregio, Biblioteca Francescana, Milano 1973; Francesco Corvino, Bonaventura da Bagnoregio francescano e pensatore, Dedalo, Bari 1980.

[1] Ainsi Jacques Guy Bougerol o.f.m. conclut-il le Congrès sur saint Bonaventure de Rome, le 26 septembre 1974, cité dans Leonardo Piazza, Mediazione simbolica in san Bonaventura, Edizioni L.I.E.F., Vicenza 1978, p. 65.

[1] Sixte V, Bulle Triumphantis Jerusalem.

[1] St. Thomas d’Aquin, Summa Theologica, I, q. 1, a. 6; q. 79, a. 1O, ad 3.

[1] St. Bonaventure, Hexäemeron, col. 2, n. 12 (V, 340 a).

[1] Sag. XI, 21.

[1] Edgar de Bruyne, L’esthétique du Moyen Age, Editions de l’Institut Supérieur de Philosophie, Louvain 1947, p. 11. Cf. aussi id., Etudes d’esthétique médiévale, De Tempel, Brugge 1946, 3 vol. “Sous quelque aspect qu’on l’envisage, il n’existe en réalité qu’une seule vision médiévale du monde, bien qu’elle s’exprime tantôt en oeuvres d’art, tantôt en concepts philosophiques définis: celle que saint Augustin avait magistralement esquissée dans son De Trinitate et qui se rattache directement à cette parole de la Sagesse (XI, 21): ‘omnia in mensura, et numero, et pondere disposuisti’” (E. Gilson, L’esprit de la philosophie médiévale, Vrin, Paris 1932, p. 105).


[1] Miguel Beccar Varela, Lettre à l’auteur.

[1] Johan Huizinga, L’automne du Moyen Age, Payot, Paris 1989, p. 213. “L’homme médiéval vivait effectivement dans un monde peuplé de significations, de renvois, manifestations de Dieu dans les choses, dans une nature qui parlait continuellement un langage héraldique (...) puisqu’elle était signe d’une vérité supérieure. (...) Dans la vision symbolique, la nature, même sous ses aspects les plus redoutables, devient l’alphabet avec lequel le Créateur nous parle de l’ordre du monde, des biens surnaturels, du chemin à faire pour nous orienter dans le monde de façon à acquérir les récompenses célestes. (...) Le Christianisme primitif était habitué à la traduction symbolique des principes de la foi” (Umberto Eco, Arte e bellezza nell’estetica medievale, Bompiani, Milano 1978, p. 68-69). Une fresque du cosmos symbolique médiéval a été peinte par Marie-Madeleine Davy, Initiation à la symbolique romane, Flammarion, Paris 1977.

[1] St. Iréné, Adversus haereses, livre V, l. IV, c. 2.

[1] St. Bonaventure, Hexäemeron, col. 12, n. 14-15.

[1] Cette ressemblance, comme observe Etienne Gilson, n’implique pas une participation des choses à l’essence de Dieu. “La ressemblance réelle qui existe entre le Créateur et les créatures est une ressemblance d’expression. Les choses sont à Dieu ce que les signes sont à la signification qu’ils expriment; elles constituent donc une sorte de langage, et l’univers tout entier n’est qu’un livre dans lequel se lit partout la Trinité” (E. Gilson, La philosophie au Moyen Age, Payot, Paris 1952, p. 442).

[1] St. Bonaventure, Breviloquium, p. 2, c. 12 (V, 230 a).

[1]Quarta via sumitur ex gradibus qui in rebus inveniuntur”. De toutes les preuves thomistes, observe Gilson, la quatrième est celle qui a suscité le plus grand nombre d’interprétations différentes (E. Gilson, Le thomisme, Vrin, Paris 1972, p. 82). Cf. C. Fabro c.p.s., Sviluppo, significato e valore della IV via, dans “Doctor Communis”, n. 7 (1954), p. 71-109; id., Il fondamento metafisico della quarta via, dans “Doctor Communis”, n. 7 (1954), p. 49-70, réunis maintenant dans L’uomo e il rischio di Dio, Studium, Roma 1967, p. 226-271.

[1] P. Corrêa de Oliveira, O Escapulário, a Profissão e a Consagração interior, exposé au IIIe Congrès National de l’Ordre Tertiaire des Carmes (São Paulo, 14-16 novembre 1958), dans “Mensageiro do Carmelo”, édition spéciale de 1959.

[1] Cf. Leo J. Elders, La metafisica dell’essere di san Tommaso d’Aquino in una prospettiva storica, trad. it. Libreria Editrice Vaticana, Città del Vaticano 1995, vol. I, p. 167. Sur le “pulchrum” dans saint Thomas, cf. Summa Theologica, I, q. 5, a. 4; I, q. 39, a. 8; I-IIae, q. 27, a. 1 ad 3.

[1]La Beauté divine, c’est la splendeur de toutes les perfections harmonisées, comme le beau, dans l’ordre créé, est la splendeur de tous les transcendantaux réunis, de l’être, de l’un, du vrai et du bien, ou, plus particulièrement, l’éclat d’une harmonieuse unité de proportion dans l’intégrité des parties (splendor, proportio, integritas, cf. Ia, q. 39, a. 8)” (R. Garrigou-Lagrange o.p., Perfections Divines, Beauchesne, Paris 1936, p. 299).

[1] François Joseph Thonnard a.a., Précis de Philosophie, Desclée, Tournai 1966, p. 1227.

[1] P. Corrêa de Oliveira, Révolution et Contre-Révolution, cit., p. 72.

[1] P. Corrêa de Oliveira, Sêde prudentes como as serpentes e simples como as pombas, dans “Catolicismo”, n. 37 (janvier 1954).

[1] P. Corrêa de Oliveira, Indumentaria, hierarquia e igualitarismo, dans “Catolicismo”, n. 133 (janvier 1962); id., O habito e o monge, dans “Catolicismo”, n. 62 (février 1956).

[1] Pie XII, Discours de tout Coeur, du 8 novembre 1957, dans DP (1957), p. 664 .

[1] P. Corrêa de Oliveira, Dignidade e distinção para grandes e pequenos, dans “Catolicismo”, n. 33 (septembre 1953).

[1] P. Corrêa de Oliveira, O espirito cristão e o espirito pagão manifestados pela arquitetura, dans “Catolicismo”, n. 7 (juillet 1951).

[1] Cf. Erwin Panofsky, Architecture gothique et pensée scolastique, tr. fr. Editions de Minuit, Paris 1967.

[1] P. Corrêa de Oliveira, Tranquilidade da ordem, excitação na desordem, dans “Catolicismo”, n. 110 (février 1960).

[1] P. Corrêa de Oliveira, Têm os simbolos, a pompa e a riqueza uma função na vida humana?, dans “Catolicismo”, n. 82 (octobre 1957). Sur le thème du cérimonial du pouvoir pontifical, cf. aussi les deux études Por que o nosso mundo pobre e igualitario se empolgou com o fausto e a magestade da coroação?, dans “Catolicismo”, n. 27 (mars 1953) et n. 31 (juillet 1953).

[1] P. Corrêa de Oliveira, Pobreza e fausto: extremos harmonicos no firmamento da Igreja, dans “Catolicismo”, n. 96 (décembre 1958).

[1] P. Corrêa de Oliveira, Révolution et Contre-Révolution, cit., p. 83.

[1] Id., p. 82.

[1] S. Pie X, Encyclique Jucunda Sane, du 12 mars 1904, dans AAS, vol. XXXVI, p. 524.

[1] P. Corrêa de Oliveira, Révolution et Contre-Révolution, cit., p. 88. Il distingue entre les contre-révolutionnaires “actuels” qui ont une vision complète, et les contre-révolutionnaires “potentiels” qui perçoivent la lutte seulement sous quelques aspects particuliers. Ils devraient être enthousiasmés par la contre-révolution intégrale.

[1] P. Corrêa de Oliveira, Révolution et Contre-Révolution, cit., p. 106-107. Cf. aussi R. de Mattei, La vita interiore fondamento della Contro-Rivoluzione, dans “Lepanto”, n. 132-133 (juillet-août 1993).

[1] P. Corrêa de Oliveira, Révolution et Contre-Révolution, cit., p. 115.

[1] Id., p. 116.

[1] Id., p. 117.

[1] Id., p. 118.

[1] Id.

[1] Dans les éditions suivantes la conclusion est toujours restée la même, le nom de Jean XXIII étant seulement substitué par celui du nouveau Pontife Paul VI.

[1] P. Corrêa de Oliveira, Révolution et Contre-Révolution, cit., p. 125.

[1] De Marcel De Corte (1905-1994), cf. Philosophie des moeurs contemporaines, Editions Universitaires, Bruxelles 1944; L’homme contre lui-même, Nouvelles Editions Latines, Paris 1962. Sur De Corte cf. Miguel Ayuso Torres, Danilo Castellano, Juan Vallet de Goytisolo, In memoriam Marcel De Corte, dans “Verbo”, n. 327-328 (1994), p. 761-794.

[1] Jean Ousset (1914-1994), Pour qu’il règne, Dominique Martin Morin, Paris 1986. L’oeuvre de Ousset fut publiée pour la première fois en 1957 et eut de nombreuses éditions en France et plusieurs traductions. Le mouvement La cité catholique, fondé par Ousset en 1947, devint en 1963 l’Office International des Oeuvres de Formation Civique et d’Action Culturelle selon le Droit Naturel et Chrétien. Il eut son plus grand développement intellectuel en Espagne, autour de la revue “Verbo” dirigée par Juan Vallet de Goytisolo (cf. Estanislao Cantero, A los treinta anos, dans “Verbo”, n. 301-302 (janvier-février 1992), p. 7-16).

[1] Sur Augusto Del Noce (1910-1989), auteur des oeuvres déjà citées et de L’epoca della secolarizzazione (Giuffré, Milano 1970) et Il suicidio della Rivoluzione (Rusconi, Milano 1979), cf. Rocco Buttiglione, Augusto Del Noce. Biografia di un pensiero, Piemme, Casale Monferrato 1991; R. de Mattei, Augusto Del Noce y el suicidio de la Revolución, dans “Verbo”, nn. 337-338 (1995), p. 871-886.

[1] Du comte Gonzague de Reynold (1880-1970) cf. surtout L’Europe tragique, Spes, Paris 1934; La formation de l’Europe, Plon, Paris 1944-1952, 10 vol.

[1] De Francisco Elías de Tejada (1917-1978), cf. La monarquía tradicional, Rialp, Madrid 1954. Sur cette figure, cf. l’étude récente de M. Ayuso Torres, La filosofia jurídica y política di Elías de Tejada, Fundación Elías de Tejada, Madrid 1994.

[1] Charles Maurras (1869-1952), fondateur du journal et du mouvement Action Française, exerça une grande influece sur plusieurs générations d’intellectuels français. Pour un panorama sur son oeuvre cf. Eugen Weber, L’Action Française, Stock, Paris 1964. Cf. aussi Robert Havard de la Montagne, Histoire de l’Action Française, Amiot-Dumont, Paris 1950; Colette Capitain Peter, Charles Maurras et l’idéologie d’Action Française, Seuil, Paris 1972; Victor Nguyen, Aux origines de l’Action Française. Intelligence et politique à l’aube du XXe siècle, Fayard, Paris 1991.

[1] Le “tournant” a été bien décrit par R. Gambra Ciudad dans La monarquía social y representativa en el pensamento tradicional, Rialp, Madrid 1964, p. 21-31 et par l’article Tradicionalismo, dans GER, vol. XXII (1975), p. 671-673. Gambra fait la distinction entre un traditionalisme de droite, catholique et contre-révolutionnaire, et un traditionalisme de gauche qui, influencé par Comte, déboucha, grâce à Taine et Renan, sur l’Action Française. Cf. R. de Mattei, Augustin Cochin e la storiografia contro-rivoluzionaria, dans “Storia e Politica”, vol. 4 (1973), p. 570-585.

[1] Louis Dimier, Les maîtres de la contre-révolution au XIXe siècle, Nouvelle Librairie Nationale, Paris 1907, p. 115-135 (Balzac), p. 161-184 (Sainte-Beuve), p. 187-208 (Taine), p. 209-230 (Renan), p. 570-585 (Proudhon).

[1] Edouard Le Roy (1870-1954), disciple de Bergson, fut le philosophe qui essaya de donner une base doctrinale au modernisme. Plusieurs oeuvres du Père Garrigou-Lagrange furent écrites justement pour en réfuter le profond agnosticisme.

[1] A. Cochin, Abstraction révolutionnaire et réalisme catholique, Desclée de Brouwer, Paris Lille 1960, p. 54-55. “La méthode d’Action Française - observe Stéphane Rials - n’ignore pas la transcendance, mais elle en effectue un traitement utilitariste par le truchement du positivisme. L’Humanité de Comte devient la Nation de Maurras. La trascendance s’infléchit jusqu’à l’horizontale, l’immanence est idolâtrée, la Providence niée” (Révolution et Contre-Révolution au XIXe siècle, cit., p. 48-49).

[1] Du Père Georges de Pascal (1840-1918) cf. Enseignement social, vues sociales d’un homme de tradition, Rondelet, Paris 1899; Révolution et Contre-Révolution, le centenaire de 1789 et les conservateurs catholiques, avec une lettre de M. le Marquis de la Tour du Pin, Impr. de Saudaux, Paris 1898. Cf. A. de Lavalette Mobrun, Le père de Pascal, Jouve, Paris 1918.

[1] Jean-Martial Besse (1861-1920), savant historien bénédictin, fut chargé en 1909 de la chaire de Syllabus à l’Institut d’Action Française. De lui: L’Eglise et les libertés, cit.; Eglise et Monachie, Jouve, Paris 1910; Le catholicisme libéral, Desclée, Paris 1911; Les Religions laïques, Nouvelle Librairie Nationale, Paris 1913.

[1] Cet aspect a été remarqué par Jean Madiran: “A la génération de catholiques, formés catholiquement, et venus à l’Action Française en vertu d’un ‘compromis pour l’action’, succéda une génération qui avait une formation maurrassienne et n’était plus sensible à ce qu’il pouvait y avoir de ‘choquant’, en tout cas d’inacceptable, pour un chrétien, dans la pensée de Maurras” (J. Madiran, L’intégrisme, histoire d’une histoire, Nouvelles Editions Latines, Paris 1964, p. 97).

[1] Le 2 janvier 1914, la Congrégation de l’Index jugea que cinq livres de Maurras (Le Chemin de Paradis, Anthinea, Les Amants de Venise, Trois idées politiques, L’avenir de l’intelligence) et le journal “L’Action Française” qu’il dirigeait, méritaient une condamnation. Saint Pie X jugea opportun de renvoyer la promulgation du décret du 29 janvier 1914, mais l’excommunication fut émise par Pie XI en 1926. En 1939, après la signature de la part du conseil de direction de l’ Action Française, d’une déclaration de soumission, les sanctions relatives au journal furent levées par Pie XII (cf. Décret du Saint Office du 10 juillet 1939; réponse de la Sacra Penitenziera du 24 juillet de la même année; la condamnation des écrits de Maurras énumérés dans l’Index resta en vigueur). Cf. aussi Lucien Thomas, L’Action Française devant l’Eglise. De Pie X à Pie XII, Nouvelles Editions Latines, Paris 1965; Michael Sutton, Nationalism, positivism and catholicism: the politics of Maurras and French catholics, Cambridge University Press, London 1982; Oscar L. Arnal, Ambivalent alliance. The catholic church and the Action Française. 1899-1939,  University of Pittsburgh Press, Pittsburgh 1985; André Laudouze, Dominicains français et Action Française, Les Editions Ouvrières, Paris 1989.

[1] Lorsque l’excommunication fut révoquée par Pie XII, il mit fin à la polémique avec ces mots: “Il n’y a aucun mal plus grand que de prétendre être plus catholique que le Pape. Rome a parlé: la question est terminée. Que personne ne se laisse aller à des enthousiasmes sans réserves ou à des sévérités inopportunes” (P. Corrêa de Oliveira, “Action Française”, dans “O Legionário”, n. 359 (30 juillet 1939)). Cf. aussi id., A “Action Française” e a Liga das Nações, dans “O Legionário”, n. 276 (26 décembre 1937); id., “Action Française”, dans “O Legionário”, n. 349 (21 mai 1938).

[1] Cf. par exemple le numéro spécial de la revue “Itinéraires”, n. 122 (avril 1968), dédié à Maurras, avec des articles de Jean Madiran, Henri Charlier, Jean Ousset, Pierre Gaxotte, Roger Joseph, V. A. Berto, Henri Rambaud, Gustave Thibon, Jean-Baptiste Morvan, Jacques Vier, Louis Salleron, Georges Lafly, Marcel De Corte.

[1] Voir une description de cette mentalité dans la petite plaquette La mano che estingue, la voce che addormenta, aux soins du Bureau Tradition, Famille, Propriété, Roma 1996.


[1] Pour une analyse de cet itinéraire, cf. R. de Mattei, Il centro che ci portò a sinistra, Fiducia, Roma 1994 et le manifeste du Centre Culturel Lepanto Prodi il Kerensky italiano?, dans “Il Tempo” et “Il Giornale” du 14 mai 1996. Cf. aussi G. Cantoni, La lezione italiana, Cristianità, Piacenza 1980.

[1] La première traduction italienne de l’oeuvre, par les Edizioni dell’Albero, remonte à 1969. La seconde, avec un essai introductif de G. Cantoni, L’Italia tra Rivoluzione e Contro-Rivoluzione, fut publiée en 1972 par les éditions de Cristianità. La troisième, avec une postface de Plinio Corrêa de Oliveira intitulée Rivoluzione e Contro-Rivoluzione vent’anni dopo, parut en 1977. “Dans cette oeuvre - écrivait Giovanni Cantoni - sont présents tous les éléments qui nous permettent de la définir comme l’expression, sous forme de thèse, de la pensée contre-révolutionnaire à l’époque de la Révolution culturelle” (Introduction, cit., p. 49). De G. Cantoni cf. aussi Plinio Corrêa de Oliveira al servizio di un capitolo della dottrina sociale della Chiesa: il commento del Magistero alla ‘parabola dei talenti’, dans “Cristianità”, n. 235 (novembre 1994).

[1] Le Centre Culturel Lépante, fondé à Rome en 1982 par l’auteur de ces pages, s’est affirmé en Italie et en Europe grâces à ses interventions doctrinales sur des thèmes comme le Nouveau Concordat (1985), le Traité de Maastricht (1992), le danger islamique (1993), la légalisation du mariage homosexuel (1994), la dénonciation de la collaboration entre catholiques et neo-communistes en Italie (1995-1996).

[1] P. Corrêa de Oliveira, Nobreza e élites tradicionais análogas, cit., trad. fr. Noblesse et élites traditionnelles dans les allocutions de Pie XII, Albatros, Paris 1993. Le livre a été traduit aussi en espagnol, anglais, italien et allemand et a reçu l’approbation de plusieurs personnalités parmi lesquelles trois cardinaux, Mario Luigi Ciappi, Silvio Oddi et Alfons M. Stickler, et deux illustres théologiens, les Pères Raimondo Spiazzi et Victorino Rodriguez


+[1] P. Corrêa de Oliveira, Rivoluzione e Contro-Rivoluzione vent’anni dopo, dans Rivoluzione e Contro-Rivoluzione, trad. it. Cristianità, Piacenza 1977, p. 167-195. Cf. en outre l’édition spéciale de “Catolicismo”, n. 500 (août 1992) avec une mise à jour de la IIIe partie.

[1] P. Corrêa de Oliveira, Noblesse et élites traditionnelles, cit., p. 127.

[1] Id., p. 144-145.

[1] Anastasio Gutiérrez c.m.f., Lettre à Juan Miguel Montes du 8 septembre 1993.