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Cinq cardinaux présentent de nouveaux dubia, mais le Pape François se dérobe

COMMUNIQUÉ DE PRESSE – tfp-france.org.

Notification aux fidèles du Christ (can. 212 § 3)
au sujet des “Dubia” soumis au Pape François

Chers frères et sœurs dans le Christ,

Nous, membres du Sacré Collège des Cardinaux, en vertu du devoir de tous les fidèles « de donner aux Pasteurs sacrés leur opinion sur ce qui touche le bien de l’Église » (can. 212 § 3), et surtout en vertu de la responsabilité incombant aux Cardinaux d’assister « le Pontife Romain… individuellement… surtout dans le soin quotidien de l’Église tout entière » (can. 349), au vu de diverses déclarations de prélats haut placés se rapportant à la célébration du prochain Synode des Évêques, déclarations ouvertement contraires à la doctrine et à la discipline constantes de l’Église, et qui ont engendré et continuent d’engendrer parmi les fidèles et les autres personnes de bonne volonté une grande confusion ainsi que la chute dans l’erreur, nous avons manifesté au Pontife romain notre très profonde préoccupation. Par notre lettre du 10 juillet 2023, recourant à la pratique éprouvée de la soumission de dubia [questions] à un supérieur pour donner à ce dernier l’occasion de clarifier, par ses responsa [réponses], la doctrine et la discipline de l’Église, nous avons soumis cinq dubia au pape François, dont une copie est jointe en annexe. Le pape François y a répondu par lettre du 11 juillet 2023.

Ayant étudié sa lettre qui ne suivait pas la pratique habituelle des responsa ad dubia [réponses aux questions], nous avons reformulé les dubia pour obtenir une réponse claire fondée sur la doctrine et la discipline pérennes de l’Église. Par notre lettre du 21 août 2023, nous avons soumis au Pontife romain les dubia reformulés, dont une copie est jointe en annexe. À ce jour, nous n’avons pas reçu de réponse à ces dubia reformulés.

Étant donné la gravité de la matière de ces dubia, et spécialement en raison de l’imminence de la session du Synode des Évêques mentionnée plus haut, nous estimons qu’il est de notre devoir de vous informer, vous les fidèles (can. 212 § 3), afin que vous ne soyez pas sujets à la confusion, à l’erreur et au découragement, mais que vous puissiez prier pour l’Église universelle et, en particulier, pour le Pontife romain, afin que l’Évangile soit enseigné avec toujours plus de clarté, et suivi avec une fidélité toujours croissante.

Bien vôtres dans le Christ,

Card. Walter BRANDMÜLLER Card. Raymond Leo BURKE
Card. Juan SANDOVAL ÍÑIGUEZ Card. Robert SARAH
Card. Joseph ZEN ZE-KIUN

Rome, le 2 Octobre 2023

Pour faciliter la lecture, nous reproduisons ci-après séparément chaque dubium, suivi de la réponse respective du pape et de la reformulation du même dubium pour tenir compte de ladite réponse.

Bien que François ait répondu aux premiers dubia le lendemain, il n’a pas répondu du tout aux dubia reformulés.

Après la publication de la Notification aux fidèles, le Vatican s’est limité à publier la réponse du pape aux premiers dubia en omettant la date de la lettre. Plusieurs analystes ont interprété cette omission comme une manœuvre pour faire croire qu’il s’agissait d’une réponse récente et définitive à la dernière formulation des dubia ou, alors, que la reformulation venait d’être envoyée au pape François.

C’est ce que le néo-cardinal Victor Manuel Fernández, préfet du Dicastère pour la Doctrine de la foi Déclaration, a voulu faire croire dans une déclaration au journal ABC, de Madrid : 

« Le Pape a déjà répondu aux ‘dubia’ de ces cardinaux. Ils n’ont pas publié la réponse du Saint-Père, qui malgré ses nombreuses occupations a pris la peine d’y répondre. Au lieu de publier ces réponses, ils rendent désormais publiques de nouvelles questions, comme si le Pape était leur esclave pour les courses. »

Les cinq dubi

Présenté le 10 juillet 2023

1. Dubium à propos de l’affirmation selon laquelle nous devons réinterpréter la Révélation divine en fonction des changements culturels et anthropologiques à la mode.

A la suite des déclarations de certains évêques, ni corrigées, ni rétractées, il est demandé si, dans l’Eglise, la Révélation divine doit être réinterprétée en fonction des changements culturels de notre temps et de la nouvelle vision anthropologique que ces changements favorisent ; ou si la Révélation divine lie pour toujours, est immuable et ne peut donc être contredite, comme l’affirme l’enseignement du Concile Vatican II selon lequel à Dieu qui révèle est due l’obéissance de la foi (Dei Verbum 5) ; que ce qui est révélé pour le salut de tous doit demeurer « toujours en son intégrité » et transmis « à toutes les générations » (7) ; et que le progrès de la compréhension n’implique aucun changement dans la vérité des choses et des mots, parce que la foi « leur a été une fois pour toutes transmise » (8), et que le Magistère n’est pas supérieur à la Parole de Dieu, mais qu’il enseigne seulement ce qui a été transmis (10).

Répondu le 11 juillet 2023

Réponse du Pape François à la première question

a) La réponse dépend du sens que l’on attribue au mot « réinterpréter ». S’il est compris comme « mieux interpréter », l’expression est valable. En ce sens, le Concile Vatican II a affirmé qu’il est nécessaire que, par le travail des exégètes – et j’ajouterais, des théologiens – « le jugement de l’Église mûrisse »  (Concile œcuménique Vatican II, Constitution dogmatique Dei Verbum, 12).

b) Par conséquent, s’il est vrai que la Révélation divine est immuable et toujours contraignante, l’Église doit être humble et reconnaître qu’elle n’épuise jamais son insondable richesse et qu’elle a besoin de grandir dans sa compréhension.

c) Par conséquent, elle grandit aussi dans sa compréhension de ce qu’elle a elle-même affirmé dans son Magistère.

d) Les changements culturels et les nouveaux défis de l’histoire n’altèrent pas la Révélation, mais peuvent nous stimuler à mieux exprimer certains aspects de sa richesse débordante et qui offre toujours plus.

e) Il est inévitable que cela puisse conduire à une meilleure expression de certaines affirmations passées du Magistère, et cela s’est effectivement produit au cours de l’histoire.

f) D’autre part, il est vrai que le Magistère n’est pas supérieur à la Parole de Dieu, mais il est également vrai que tant les textes de l’Écriture que les témoignages de la Tradition ont besoin d’une interprétation qui permette de distinguer leur substance pérenne du conditionnement culturel. Cela est évident, par exemple, dans les textes bibliques (comme Exode 21:20-21) et dans certaines interventions magistérielles qui ont toléré l’esclavage (cf. Nicolas V, Bulle Dum Diversas, 1452). Il ne s’agit pas d’un argument secondaire, vu son lien intime lié à la vérité éternelle de la dignité inaliénable de la personne humaine. Ces textes doivent être interprétés. Il en va de même pour certaines considérations du Nouveau Testament sur les femmes (1 Corinthiens 11 : 3-10 ; 1 Timothée 2 : 11-14) et d’autres textes de l’Écriture et témoignages de la Tradition qui ne peuvent être répétés tels quels aujourd’hui.

g) Il est important de souligner que ce qui ne peut pas changer, c’est ce qui a été révélé « pour le salut de tous » (Concile œcuménique Vatican II, Constitution dogmatique Dei Verbum, 7). Par conséquent, l’Église doit constamment discerner ce qui est essentiel pour le salut et ce qui est secondaire ou moins directement lié à ce but. Je souhaite rappeler ce qu’affirmait saint Thomas d’Aquin: « plus on descend dans les détails, plus l’indétermination augmente » (Summa Theologiae 1-1 1, q. 94, art. 4).

h) Enfin, la seule formulation d’une vérité ne pourra jamais être adéquatement comprise si elle est présentée isolément, isolée du contexte riche et harmonieux de l’entière Révélation. La « hiérarchie des vérités » implique également de placer chaque vérité en juste connexion avec des vérités plus centrales et avec l’enseignement de l’Église dans son ensemble. Cela peut enfin éventuellement conduire à différentes manières d’exposer la même doctrine, même si « pour ceux qui rêvent d’une doctrine monolithique défendue par tous sans nuance, cela peut sembler une dispersion imparfaite. Mais en réalité, cette variété aide à mieux manifester et à développer les différents aspects de l’inépuisable richesse de l’Évangile » (Evangelii gaudium, 40). Tout courant théologique comporte des risques, mais aussi des opportunités.

Lettre envoyée le 22 août 2023

Très Saint Père,

(…)

Usant de même sincérité dont vous avez fait preuve à travers vos réponses, nous nous devons d’ajouter que celles-ci n’ont pas levé les doutes que nous avions exprimés, mais qu’elles les ont plutôt aggravés. Nous nous voyons donc dans l’obligation de soumettre à nouveau, en les reformulant, ces questions à Votre Sainteté, vous qui en tant que Successeur de Pierre êtes chargé par le Seigneur de confirmer vos frères dans la foi. Cela est d’autant plus urgent à la veille du prochain Synode, alors que beaucoup souhaitent utiliser celui-ci pour contredire la doctrine catholique, précisément sur les points sur lesquels portent nos dubia. Nous vous soumettons donc à nouveau nos questions, afin que vous puissiez y répondre simplement par « oui » ou par « non ».

Reformulation du 1er dubium par les 5 cardinaux

1. Votre Sainteté insiste sur le fait que l’Église peut approfondir sa compréhension du dépôt de la foi. C’est en effet ce qu’enseigne Dei Verbum 8 et cela fait partie de la doctrine catholique. Votre réponse, cependant, ne saisit pas le sens de notre préoccupation. De nombreux chrétiens, y compris des pasteurs et des théologiens, soutiennent aujourd’hui que les changements culturels et anthropologiques de notre époque devraient pousser l’Église à enseigner le contraire de ce qu’elle a toujours enseigné. Cela concerne des questions qui ne sont pas secondaires, mais essentielles pour notre salut, telles la confession de foi, les conditions subjectives de l’accès aux sacrements, et l’observance de la loi morale. Nous voulons donc reformuler notre dubium : est-il possible que l’Église enseigne aujourd’hui des doctrines contraires à celles qu’elle enseignait auparavant en matière de foi et de morale, que ce soit par le Pape ex cathedra, ou selon les définitions d’un Concile œcuménique, ou encore selon le Magistère ordinaire universel des Évêques dispersés dans le monde (cf. Lumen Gentium 25) ?

PAS DE RÉPONSE DU PAPE FRANÇOIS

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Présenté le 10 juillet 2023

2. Dubium à propos de l’affirmation selon laquelle la pratique généralisée de la bénédiction des unions homosexuelles serait en accord avec la Révélation et le Magistère (CEC 2357).

Selon la Révélation divine, confirmée par l’Ecriture Sainte, que l’Eglise « par mandat de Dieu, avec l’assistance de l’Esprit Saint, (…) écoute (…) avec amour, (elle) la garde saintement et l’expose aussi avec fidélitée (Dei Verbum 10) : « Au commencement », Dieu créa l’homme à son image, homme et femme il les créa, et les bénit pour qu’ils soient féconds (cf. Gn I, 27-28), et l’apôtre Paul enseigne que la négation de la différence sexuelle est la conséquence de la négation du Créateur (Rm I, 24-32). Il est demandé : l’Église peut-elle déroger à ce « principe », en le considérant, contrairement à ce qu’enseignait Veritatis Splendor 103, comme un simple idéal, et en acceptant comme un « bien possible » des situations objectivement peccamineuses, telles les unions homosexuelles, sans trahir la doctrine révélée ?

Répondu le 11 juillet 2023

Réponse du Pape François à la deuxième question

a) L’Église a une conception très claire du mariage : une union exclusive, stable et indissoluble entre un homme et une femme, naturellement ouverte à la procréation d’enfants. Seule cette union peut être appelée « mariage ». Les autres formes d’union ne le réalisent que « de manière partielle et analogique » (Amoris laetitia 292) et ne peuvent donc pas être strictement appelées « mariage ».

b) Ce n’est pas seulement une question de noms, mais la réalité que nous appelons mariage a une constitution essentielle unique qui requiert un nom exclusif, non applicable à d’autres réalités. Elle est sans aucun doute beaucoup plus qu’un simple « idéal ».

c) C’est pourquoi l’Église évite tout type de rite ou de sacramentel qui pourrait contredire cette conviction et faire croire que l’on reconnaît comme mariage quelque chose qui ne l’est pas.

d) Cependant, dans nos relations avec les personnes, nous ne devons pas perdre la charité pastorale, qui doit imprégner toutes nos décisions et attitudes. La défense de la vérité objective n’est pas la seule expression de cette charité, qui est aussi faite de bonté, de patience, de compréhension, de tendresse et d’encouragement. Nous ne pouvons donc pas être des juges qui ne font que nier, rejeter, exclure.

e) La prudence pastorale doit donc discerner correctement s’il existe des formes de bénédiction, demandées par une ou plusieurs personnes, qui ne véhiculent pas une conception erronée du mariage. En effet, lorsqu’on demande une bénédiction, on exprime une demande d’aide à Dieu, un appel à pouvoir mieux vivre, une confiance en un Père qui peut nous aider à mieux vivre.

f) D’autre part, bien qu’il existe des situations qui, d’un point de vue objectif, ne sont pas moralement acceptables, la même charité pastorale nous demande de ne pas traiter simplement comme « pécheurs » d’autres personnes dont la culpabilité ou la responsabilité peuvent être atténuées par divers facteurs qui influencent l’imputabilité subjective (cf. saint Jean-Paul II, Reconciliatio et Paenitentia, n. 17).

g) Les décisions qui, dans certaines circonstances, peuvent faire partie de la prudence pastorale ne doivent pas nécessairement devenir une norme. En d’autres termes, il n’est pas opportun qu’un diocèse, une Conférence épiscopale ou toute autre structure ecclésiale autorise constamment et officiellement des procédures ou des rites pour toutes sortes de questions, car tout « ce qui fait partie d’un discernement pratique face à une situation particulière ne peut être élevé au rang de norme », car cela « donnerait lieu à une casuistique insupportable » (Amoris laetitia 304). Le droit canonique ne doit pas et ne peut pas tout couvrir, et les Conférences épiscopales, avec leurs divers documents et protocoles, ne doivent pas non plus l’exiger, car la vie de l’Église passe par de nombreux canaux en plus des canaux normatifs.

Présentée le 22 août 2023

Reformulation du 2e dubium par les 5 cardinaux :

2. Votre Sainteté a insisté sur le fait qu’il ne peut y avoir de confusion entre le mariage et d’autres types d’unions de nature sexuelle et que, par conséquent, tout rite ou bénédiction sacramentelle de couples de même sexe engendrant une telle confusion devrait être évité. Cependant notre préoccupation est d’un autre ordre : nous nous inquiétons du fait que la bénédiction des couples homosexuels puisse dans tous les cas susciter à confusion, pas seulement dans la mesure où elle pourrait les faire apparaître comme analogues au mariage, mais aussi en ce que les actes homosexuels seraient présentés en pratique comme un bien, ou tout au moins comme le bien possible que Dieu demande aux hommes dans leur cheminement vers Lui. Reformulons donc notre dubium : est-il possible que, dans certaines circonstances, un pasteur puisse bénir des unions entre personnes homosexuelles, laissant ainsi entendre que le comportement homosexuel en tant que tel ne serait pas contraire à la loi de Dieu et au cheminement de la personne vers Dieu ? En lien avec ce dubium, il est nécessaire d’en soulever un autre : l’enseignement constant du Magistère ordinaire universel, selon lequel tout acte sexuel en dehors du mariage, et en particulier les actes homosexuels, constituent un péché objectivement grave contre la loi de Dieu, indépendamment des circonstances dans lesquelles ils ont lieu et de l’intention avec laquelle ils sont accompli, est-il toujours valable ?

PAS DE RÉPONSE DU PAPE FRANÇOIS

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Présenté le 10 juillet 2023

3. Dubium à propos de l’affirmation selon laquelle la synodalité est une « dimension constitutive de l’Église » (Constitution apostolique Episcopalis Communio 6), de sorte que l’Église serait, par sa nature même, synodale.Étant donné que le Synode des évêques ne représente pas le Collège des évêques, n’étant qu’un organe consultatif du Pape, et que les évêques, en tant que témoins de la foi, ne peuvent pas déléguer leur confession de la vérité, il est demandé si la synodalité peut être le critère régulateur suprême du gouvernement permanent de l’Église sans altérer l’ordre constitutif voulu par son Fondateur, selon lequel l’autorité suprême et plénière de l’Église est exercée à la fois par le Pape en vertu de sa charge et par le Collège des évêques en union avec son chef le Pontife romain (Lumen Gentium 22).

Répondu le 11 juillet 2023

Réponse du pape François à la troisième question

a) Bien que vous reconnaissiez que l’autorité suprême et plénière de l’Église est exercée à la fois par le Pape en vertu de sa charge et par le collège des évêques avec leur chef, le Pontife romain (cf. Concile œcuménique Vatican II, Constitution dogmatique Lumen Gentium, 22), vous manifestez par ces questions votre besoin de participer, d’exprimer librement votre opinion et de collaborer, demandant ainsi une forme de « synodalité » dans l’exercice de mon ministère.

b) L’Église est un « mystère de communion missionnaire », mais cette communion n’est pas seulement affective ou éthérée, elle implique nécessairement une participation réelle: non seulement la hiérarchie, mais tout le Peuple de Dieu, de différentes manières et à différents niveaux, peut faire entendre sa voix et se sentir partie prenante du cheminement de l’Église. En ce sens, nous pouvons dire que la synodalité, en tant que style et dynamisme, est une dimension essentielle de la vie de l’Église. Saint Jean-Paul II a dit de très belles choses sur ce point dans Novo millennio ineunte.

c) Sacraliser ou imposer une certaine méthodologie synodale qui plaît à un groupe, pour en faire une norme et un chemin obligatoire pour tous, est une chose différente, car cela ne conduirait qu’à « geler » le chemin synodal, en ignorant les différentes caractéristiques des diverses Églises particulières et la richesse bigarrée de l’Église universelle.

Présentée le 22 août 2023

Reformulation du 3e dubium par les 5 cardinaux :

3. Vous avez insisté sur la dimension synodale de l’Église, en ce sens que tous, y compris les fidèles laïcs, sont appelés à participer et à faire entendre leur voix. Toutefois, notre difficulté est toute autre : le futur Synode sur la « synodalité » est aujourd’hui représenté comme si, en communion avec le Pape, il représentait l’Autorité Suprême de l’Église. Or, le Synode des évêques est un organe consultatif du Pape, il ne représente pas le Collège des évêques et il ne peut pas résoudre les questions qui y sont traitées ni émettre des décrets à leur sujet, à moins que, dans des cas bien déterminés, le Pontife romain, à qui il revient de ratifier les décisions du Synode, ne lui ait expressément conféré un pouvoir délibératif (cf. c. 343 C.I.C.). Il s’agit là d’un point décisif dans la mesure où ne pas impliquer le Collège des évêques dans des questions du genre de celles que le prochain Synode entend soulever et qui ont trait à la constitution même de l’Église, serait précisément en contradiction avec la racine de cette synodalité que le Synodoe prétend vouloir promouvoir. Permettez-nous donc de reformuler notre dubium : le Synode des évêques qui se tiendra à Rome, et qui ne comprendra qu’une sélection choisie de pasteurs et de fidèles, exercera-t-il, au sujet des questions doctrinales ou pastorales sur lesquelles il sera appelé à s’exprimer, l’autorité suprême de l’Église, qui appartient exclusivement au Pontife romain et, una cum capite suo, au Collège des Évêques (cf. can. 336 C.I.C.) ?

PAS DE RÉPONSE DU PAPE FRANÇOIS

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Présenté le 10 juillet 2023

4. Dubium à propos du soutien apporté par des pasteurs et des théologiens à la théorie selon laquelle « la théologie de l’Église a changé » et que, par conséquent, l’ordination sacerdotale peut être conférée à des femmes.

A la suite des déclarations de certains prélats, ni corrigées, ni rétractées, selon lesquelles la théologie de l’Eglise et le sens de la Messe ont changé avec Vatican II, il est demandé si l’enseignement du Concile Vatican II est encore valable, selon lequel « [le sacerdoce commun des fidèles et le sacerdoce ministériel ou hiérarchique] ont entre eux une différence essentielle et non seulement de degré » (Lumen Gentium 10) et que les presbytres, du fait qu’il sont « investis par l’Ordre du pouvoir sacré d’offrir le Sacrifice et de remettre les péchés » (Presbyterorum Ordinis 2), agissent au nom et en la personne du Christ Médiateur, par qui le sacrifice spirituel des fidèles est rendu parfait. Il est en outre demandé si l’enseignement de la Lettre apostolique Ordinatio Sacerdotalis de saint Jean-Paul II, qui enseigne comme une vérité à tenir définitivement l’impossibilité de conférer l’ordination sacerdotale aux femmes, est toujours valide, de sorte que cet enseignement n’est plus soumis au changement ni à la libre discussion des pasteurs ou des théologiens.

Répondu le 11 juillet 2023

Réponse du Pape François à la quatrième question

a) « Le sacerdoce commun des fidèles et le sacerdoce ministériel qui ont entre eux une différence essentielle » (Concile œcuménique Vatican II, Constitution dogmatique Lumen Gentium, 10). Il n’est pas opportun de défendre une différence de degré qui implique de considérer le sacerdoce commun des fidèles comme quelque chose de « second ordre » ou de moindre valeur (un « degré inférieur »). Les deux formes de sacerdoce s’éclairent et se soutiennent mutuellement.

b) Lorsque saint Jean-Paul II a enseigné qu’il faut affirmer « de façon définitive » qu’il est impossible de conférer l’ordination sacerdotale aux femmes, il n’a en aucun cas dénigré les femmes et conféré le pouvoir suprême aux hommes. Saint Jean-Paul II a également affirmé d’autres choses. Par exemple, que lorsque nous parlons de pouvoir sacerdotal, « Nous sommes dans le concept de la fonction, non de la dignité et de la sainteté ». (St Jean-Paul II, Christifideles Laici, 51). Ce sont des mots que nous n’avons pas suffisamment accueillis. Il a aussi clairement affirmé que, bien que seul le prêtre préside l’Eucharistie, les tâches « ne donnent pas lieu à la supériorité de certains sur d’autres » (St Jean Paul II, Christifideles laici, note 190 ; Cf. Congrégation pour la Doctrine de la Foi, Déclaration Inter Insigniores, VI). Il a également affirmé que si la fonction sacerdotale est «hiérarchique», elle ne doit pas être comprise comme une forme de domination, mais comme « totalement ordonnée à la sainteté des membres du Christ » (St Jean Paul II, Mulieris dignitatem, 27). Si l’on ne comprend pas cela et si l’on ne tire pas les conséquences pratiques de ces distinctions, il sera difficile d’accepter que le sacerdoce soit réservé aux seuls hommes et l’on ne pourra pas reconnaître les droits des femmes ni la nécessité pour elles de participer, de diverses manières, à la conduite de l’Église.

c) D’autre part, pour être rigoureux, nous reconnaissons qu’une doctrine claire et faisant autorité sur la nature exacte d’une « déclaration définitive » n’a pas encore été élaborée de manière exhaustive. Il ne s’agit pas d’une définition dogmatique, cependant, elle doit être acceptée par tous. Personne ne peut la contredire publiquement et pourtant elle peut faire l’objet d’études, comme dans le cas de la validité des ordinations dans la Communion anglicane.

Présentée le 22 août 2023

Reformulation du 4e dubium par les 5 cardinaux :

4. Dans votre réponse, Votre Sainteté avez précisé que la décision de saint Jean-Paul II dans Ordinatio sacerdotalis doit être tenue pour définitive ; vous avez ajouté à juste titre qu’il est nécessaire de comprendre le sacerdoce, non pas en termes de pouvoir, mais en termes de service, afin de comprendre correctement la décision de notre Seigneur de réserver les Ordres sacrés aux seuls hommes. Néanmoins, dans le dernier point de votre réponse, vous ajoutez que la question peut encore être approfondie. Nous craignons que certains n’interprètent cette déclaration comme signifiant que la question n’a pas encore été définitivement tranchée. En fait, saint Jean-Paul II affirme dans Ordinatio sacerdotalis que cette doctrine a été enseignée infailliblement par le Magistère ordinaire et universel et qu’elle fait donc partie du dépôt de la foi. C’était la réponse de la Congrégation pour la Doctrine de la foi à un dubium soulevé à propos de la lettre apostolique, et cette réponse a été approuvée par Jean-Paul II lui-même. Il nous faut donc reformuler notre dubium : l’Église pourrait-elle à l’avenir avoir la faculté de conférer l’ordination sacerdotale à des femmes, contredisant ainsi le fait que la réservation exclusive de ce sacrement à des hommes baptisés appartient à la substance même du sacrement de l’ordre, que l’Église ne peut pas changer ?

PAS DE RÉPONSE DU PAPE FRANÇOIS

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Présenté le 10 juillet 2023

5. Dubium à propos de l’affirmation « le pardon est un droit humain » et de l’insistance du Saint-Père quant au devoir d’absoudre tout le monde et toujours, de sorte que la contrition ne serait pas une condition nécessaire à l’absolution sacramentelle. 

Il est demandé si l’enseignement du Concile de Trente, selon lequel la contrition du pénitent, qui consiste à détester le péché commis avec l’intention de ne plus pécher (Session XIV, Chapitre IV : DH 1676), est une condition nécessaire à la validité de la confession sacramentelle, est toujours en vigueur, de sorte que le prêtre doit différer l’absolution lorsqu’il est clair que cette condition n’est pas remplie.

Répondu le 11 juillet 2023

Réponse du Pape François à la cinquième question

a) Le repentir est nécessaire pour la validité de l’absolution sacramentelle et implique l’intention de ne pas pécher. Mais il n’y a pas de mathématiques ici et je dois vous rappeler une fois de plus que le confessionnal n’est pas un bureau de douane. Nous ne sommes pas des maîtres, mais d’humbles intendants des sacrements qui nourrissent les fidèles, parce que ces dons du Seigneur, plutôt que des reliques à garder, sont des aides de l’Esprit Saint pour la vie des gens.

b) Il y a de nombreuses façons d’exprimer le repentir. Souvent, chez les personnes dont l’estime de soi est très blessée, plaider coupable est une torture cruelle, mais le simple fait de s’approcher de la confession est une expression symbolique du repentir et de la recherche de l’aide divine.

c) Je voudrais également rappeler que « parfois, il nous coûte beaucoup de faire place à l’amour inconditionnel de Dieu dans la pastorale » (Amoris laetitia 311), mais qu’il faut l’apprendre. À la suite de saint Jean-Paul II, je soutiens que nous ne devrions pas exiger des fidèles des intentions de correction trop précises et certaines, qui finissent par devenir abstraites ou même narcissiques, mais même la prévisibilité d’une nouvelle chute « ne porte pas atteinte à l’authenticité de l’intention » (saint Jean-Paul II, Lettre au Card. William W. Baum et aux participants au cours annuel de la Pénitencerie apostolique, 22 mars 1996, 5).

d) Enfin, il doit être clair que toutes les conditions qui sont habituellement posées à l’aveu ne sont généralement pas applicables lorsque la personne se trouve dans une situation d’agonie ou avec des capacités mentales et psychiques très limitées.

Présentée le 22 août 2023

Reformulation du 5e dubium par les 5 cardinaux :

5. Enfin, Votre Sainteté a confirmé l’enseignement du Concile de Trente selon lequel la validité de l’absolution sacramentelle requiert le repentir du pécheur, ce qui inclut l’intention de ne plus pécher. Et vous nous avez invités à ne pas douter de l’infinie miséricorde de Dieu. Nous voudrions réaffirmer que notre question ne résulte pas d’un doute sur la grandeur de la miséricorde de Dieu ; elle est née au contraire de la conscience de ce que cette miséricorde est assez grande pour nous rendre capables de nous convertir à Lui, de confesser notre faute et de vivre comme Il nous l’a enseigné. Cependant, certains pourraient interpréter votre réponse comme signifiant que le simple fait de s’approcher de la confession est une condition suffisante pour recevoir l’absolution, dans la mesure où cette démarche pourrait inclure implicitement la confession des péchés et le repentir. Nous voudrions donc reformuler notre dubium : un pénitent peut-il validement recevoir l’absolution sacramentelle si, tout en avouant un péché, il refuse de prendre d’une quelconque manière la résolution de ne pas le commettre à nouveau ?

PAS DE RÉPONSE DU PAPE FRANÇOIS

 

Photo : American TFP. tfpstudentaction.org

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