Des Mémoires du poète allemand Goethe :
Un autre fait m’a volé mes derniers jours. J’étais dans une maison de campagne, en compagnie de gens agréables, et de là on pouvait voir la partie antérieure du couvent et la tour [de la cathédrale de Strasbourg] qui ressortait majestueusement.
Quelqu’un a commenté : « Dommage que tout ne soit pas fini et que nous n’ayons que la tour à voir ! »
Mais j’ai répliqué : « Il est dommage que l’on ne puisse pas pleinement apprécier cette tour; car les quatre volutes sont maladroites et il vaudrait mieux qu’il y ait, à leur place, quatre petites tourelles élancées, ainsi qu’une plus haute au milieu, où se trouve cette croix pesante ».
Quand j’ai fait cette remarque avec ma simplicité habituelle, un petit homme vif s’est tourné vers moi et m’a dit :
« Qui vous a dit ça ? »
J’ai dit : « La tour elle-même ! Je l’ai regardée si souvent, avec tant d’attention, et je lui ai montré tant de vénération, qu’elle m’a un jour confessé ce secret évident ».
Cette personne me dit :
? « Elle vous a informé avec précision ! Je le sais très bien, puisque je suis le responsable de la construction du bâtiment. J’ai dans mes dossiers le plan original qui confirme ce que vous dites, et je peux vous le montrer ».
En raison de mon voyage, je lui ai demandé s’il pouvait me faire cette gentillesse.
Il a donc fait apporter le précieux plan.
J’ai immédiatement reconnu les tourelles qui manquaient et qui étaient peintes à l’huile sur le plan et j’ai regretté de ne pas en avoir été informé auparavant.
Mais cela m’arrive toujours : quand je regarde et que j’analyse les choses, ce n’est que bien après et avec beaucoup d’efforts que j’arrive à un concept princeps qui ne me serait pas aussi remarquable et fructueux que s’ils me l’avaient expliqué avant !
Source : https://catedraismedievais.blogspot.com/2014/09/estrasburgo-quem-lhe-disse-isso-propria.html
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