Dans un entretien à Valeurs Actuelles, le démographe Gérard-François Dumont, professeur à la Sorbonne et président de la revue Population & Avenir, tire la sonnette d’alarme sur le déclin démographique de notre pays.
Pour lui, la France a renoncé à se perpétuer. Une démission collective qui, sans une prise de conscience rapide et une réaction globale, deviendra irréversible, note la rédaction de l’hebdomadaire.
Il rappelle que « l’indice de fécondité de la France métropolitaine est à 1,76 enfant par femme et, avec un solde naturel (naissances moins décès) à + 32 000, quand il était à nettement plus de 200 000 en 2014. Le déficit n’est pas loin, puisque s’accentue ce que j’ai appelé l’hiver démographique. »
Le démographe dénonce une injustice flagrante de la politique familiale actuelle : « (…) Je m’explique : dans nos sociétés, la “contre-acception” de l’enfant, via la pilule, le stérilet ou l’avortement, est prise en charge collectivement par les budgets publics ; une politique de justice suppose donc que l’acception de l’enfant soit aussi possible grâce à une politique familiale collectivement assumée. Et cette dernière doit être pérenne, puisqu’un enfant est un projet qui s’inscrit naturellement dans la durée », insiste-t-il.
De fait, reconnaît-il, « il y a un désir collectif qui se trouve découragé par une politique devenue hostile à l’enfant. »
Quant à la nouvelle mode du “pas d’enfant” (no kids), appuyée sur des pseudo-études qui soulignent l’impact (supposé négatif) d’un enfant sur la planète, le spécialiste explique :
« Si l’on examine les enquêtes fines réalisées, on observe que le nombre idéal d’enfants est nettement supérieur au chiffre constaté. Il y a donc un désir collectif qui se trouve découragé par une politique devenue hostile à l’enfant, dans le contexte d’un narratif malthusien – qui avait d’ailleurs précédé Malthus – qui vient de se renouveler. Le narratif malthusien, très fort dans les années 1970 (…), avait diminué en intensité, ses prédictions (famines, catastrophes environnementales, surmortalité, etc.) ayant été totalement disqualifiées par la réalité. »
« Il revient aujourd’hui en se fondant, comme chaque fois, sur un nouvel argument, ici le malthusianisme “climatique”. Considérer que l’enfant qui naît est davantage une pollution qu’une espérance – (…), c’est profondément désespérant. C’est un aveuglement complet quant à la réalité de l’histoire de l’humanité – en particulier du progrès, ressort de la formidable croissance de l’espérance de vie », fustige-t-il.
« Le problème (…) c’est notre société tout entière. C’est la priorité donnée au court terme, et par nos élites plus encore que par le reste de la société. Il faudrait méditer ces deux citations, que je soumets toujours à mes étudiants : “Celui qui n’a pas d’objectifs ne risque pas de les atteindre” (Sun-Tzu). Force est de reconnaître que notre société ne propose guère d’objectifs dignes de ce nom. (…)
Le retour du malthusianisme, pour lequel la natalité est une nuisance, témoigne bien de notre incapacité à penser le futur et donc à agir intelligemment dès à présent », conclut M. Dumont.
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